L’insémination artificielle est une biotechnologie de maîtrise de la reproduction chez les humains comme chez les animaux. Elle est considérée comme la première génération des biotechnologies animales. Aussi, c’est un outil d’amélioration génétique qui consiste à recueillir la semence chez le mâle et à l’introduire dans les voies génitales de la femelle à l’aide d’un instrument approprié, sans qu’il y ait accouplement. Ainsi, la semence recueillie peut être utilisée immédiatement ou après une longue période de conservation sous forme réfrigérée ou congelée (cryoconservation). Au Niger, l’Insémination Artificielle a démarré en 2001 avec le Projet de production et de diffusion de semences du zébu Azawak, un Projet, fruit du partenariat entre le Niger et l’Italie.
L’insémination artificielle des animaux est une technologie certes, mais elle est aussi une nécessité pour les humains qui cherchent sans cesse à satisfaire leurs besoins, alimentaires surtout. Avec un cheptel estimé à 57 329 696 têtes de bétail (DS, 2022), le Niger est un pays où la production laitière nationale actuelle est loin de satisfaire la demande. Selon les techniciens, la production en lait est limitée d’une part par la sous-alimentation du bétail, mais aussi d’autre part par la faiblesse du potentiel génétique de nos races ainsi qu’une mauvaise gestion de la reproduction. C’est pourquoi, pour répondre à la satisfaction des besoins de la consommation intérieure en lait et viande et augmenter les revenus des producteurs, l’Etat a mis en œuvre le Programme National d’Amélioration Génétique des Bovins Locaux (PNAG/BL) depuis 2008 et la création d’une Direction d’Amélioration Génétique en 2017.
Ces Structures visent à contribuer à la préservation et à l’amélioration du potentiel génétique des races locales tout en augmentant leurs performances de production en lait et viande. La Directrice de l’Amélioration Génétique Mme Abdou Balkissa Gado Garba, contactée à ce sujet explique que l’insémination artificielle permet d’augmenter les productions animales tant en termes de lait que de viande, contribuant ainsi à la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Elle offre également des avantages de contrôle des maladies animales, de gestion de la reproduction et est économique (coût d’alimentation et d’entretien des mâles).
Compte tenu de plusieurs résultats positifs obtenus, l’impact de l’insémination artificielle au Niger est aujourd’hui appréciable. De nombreux éleveurs font recours à cette technique. Il s’agit notamment des croisements des races locales avec des races exotiques qui ont été réalisés au niveau de la Station Expérimentale de Toukounous, en milieu réel sous forme de campagne et à la demande des éleveurs. Au Niger les principales races exotiques utilisées sont la race Brune des Alpes et Holstein. Ce sont des races connues pour leur capacité à produire du lait. Au Niger, on peut se réjouir du taux de réussite moyen des inséminations qui est passé de 18% en 2012 à 47% en 2021 pour une moyenne annuelle de 40%.
Les avantages de l’insémination sont multiples sur la productivité et la reproduction de notre cheptel. Mme Abdou Balkissa informe que pour les âges à la reproduction, la 1ère saillie fécondante et à la 1ère mise-bas des croisées F1 sont beaucoup plus courts que ceux des races locales de 17 à 24 mois contre 38 à 48 mois. Quant à la croissance, le poids à la naissance des veaux croisés F1 de 34 kg sont nettement plus élevés que ceux des races locales de 21 à 23 kg. Il en est de même pour les poids à âge-type de six mois 135 kg contre 81 à 98 kg pour les races locales.
Aussi, la production laitière des bovins croisés est de 10 litres de lait par jour et peut atteindre 15 l/jour à partir de la deuxième mise-bas. Il faut noter aussi l’existence de spécimen à haute productivité pouvant aller jusqu’à 18 litres à plus par jour à la deuxième mise-bas. Alors qu’en milieu traditionnel, la production laitière varie de 2 à 4 litres par jour et par vache. « Les croisés F1 ont une exigence alimentaire et sanitaire plus élevées que nos races locales. En milieu traditionnel chez l’éleveur qui ne peut pas entretenir un métis, on peut utiliser les semences de nos races locales sélectionnées (azawak). En Elevage semi-intensif ou intensif, on peut utiliser les semences exotiques qui sont susceptibles de donner des produits qui auront un bon potentiel génétique plus élevé que celui de nos races locales », explique la Directrice de l’Amélioration Génétique.
Toutefois, en cette période de sanction ou nous assistons à la rareté des produits de première nécessité et aussi à une flambée des prix de certaines denrées alimentaires tels que les produits et sous-produits d’élevage, des actions peuvent être menées afin de faciliter et renforcer la mise en œuvre de la stratégie d’amélioration génétique à travers l’insémination de nos races locales avec les semences de nos races locales performantes sélectionnées Azawak. La technicienne propose en outre la promotion des cultures fourragères pour améliorer les performances alimentaires des vaches inséminées et des mâles soumis à l’embouche ainsi que l’amélioration des conditions d’élevage (habitat, hygiène et santé, alimentation). « Toutes ces mesures concourront à améliorer la production et la productivité de nos races locales pour satisfaire les besoins en produits animaux de la population et ce en lien avec le Programme de Résilience pour la Sauvegarde de la Patrie (PRSP) déjà en formulation », souligne Mme Abdou Balkissa Gado Garba.
Eu égard à l’importance que revêt l’insémination artificielle dans l’amélioration des conditions alimentaires et socioéconomiques des populations, la directrice de l’amélioration génétique ajoute que la création d’un centre d’amélioration génétique disposant d’un laboratoire et d’une banque de gènes etc. s’avère nécessaire pour avoir un dispositif complet de biotechnologie de reproduction.
Salima Hamadou Mounkaila (ONEP)