Après deux jours de prières, de partage, de retrouvailles à l’occasion de la fête de Tabaski, les Nigériens renouent avec leur train-train quotidien, à savoir : le travail, les travaux maraîchers et champêtres, l’élevage, le commerce, etc sans oublier la mendicité (pour certains). Bref, la vie au jour le jour se poursuit, à la recherche du pain quotidien. Si certains disent avoir bien fêté l’Aïd El Adha ou fête de Tabaski, ces deux jours de fête ont aussi laissé des traces.
Elhadj Salou Boubacar, un commerçant au quartier Nouveau marché, paré de ses habits neufs en bazin, parade tout autour de sa boutique. « J’ai bien vécu cette fête. Car, j’ai pu sacrifier trois (3) moutons, j’ai aussi habillé toute ma famille, j’ai pris part à la prière collective de Idhi, j’ai rendu visite à mes parents, amis et connaissances pour leur demander pardon et leur souhaiter une bonne fête et enfin j’ai partagé le tiers (1/3) de la viande des animaux que j’ai immolés aux voisins et autres nécessiteux, comme le prescrit notre religion l’islam, c’est dire que j’ai bien accompli tous les rites et pratiques qu’exigent notre religion », se réjouit Elhadji Boubacar.
Mme Salimata Moussa, une enseignante dit, avoir fêté avec quelques remords, quelques frustrations et même quelques regrets. « Certes, j’ai fêté cette tabaski ; mais pas comme je l’ai voulu, car je sais que cette grande fête musulmane se prépare déjà quelques jours, sinon quelques mois avant. Mais rien d’une fête ne se préparait, d’ailleurs, même la date de cette célébration du sacrifice du Prophète Abraham (PSL), n’était pas exactement connue. Il a même fallu avoir une confusion sur le jour exact de cette fête. A cela s’est ajoutée la situation économique difficile, le manque d’argent, qui ont contribué à rendre la fête terne et morose », déplore Mme Moussa. Cependant, elle reconnait avoir effectué le sacrifice rituel de tabaski même si ses deux enfants ont fêté avec leurs vieux habits. « Je pense aux nombreuses personnes qui n’ont même pas pu sacrifier un animal à l’occasion de cette fête. Mais surtout ceux et celles qui n’ont même pas passé la fête chez eux, à cause de l’insécurité et des violences ou en tant que réfugiés », s’indigne l’enseignante.
Harouna Insa, un quinquagénaire et réfugié de Téra, vivant au quartier Guèye Koira, dans le 2ème Arrondissement de Niamey, dit n’avoir pas du tout fêté. « J’ai été chassé de mon village et je me suis refugié ici à Niamey. En venant ici, avec ma famille, j’ai été dépossédé de tous mes biens. Donc, moi je n’ai pas fêté, j’ai une famille de six (6) personnes. Mais, il y a eu une Ong qui est venue nous distribuer de la viande. Ce qui nous a permis d’avoir un vrai plat de fête. C’est tout ce que je garde de cette fête », témoigne Insa le visage triste et serré.
Le jeune Malick Sani se plaint que cette année, il n’a pas pu faire son traditionnel ‘‘Barka da Sallah’’, ‘‘Keyessi’’ ou ‘‘bonne fête’’. « A chaque fête la ‘‘ bonne fête’’ me permet de visiter mes parents et autres connaissances pour les saluer et avoir quelques cadeaux. Mais cette année, à cause de la morosité de la situation, je n’ai pas eu le courage de rendre visite aux gens. J’ai passé toute la fête à la maison et avec quelques amis autour d’un ver de thé », se plaint Sani.
En dépit de toutes ces contraintes, la plus grande fête musulmane s’est globalement et relativement bien passée car les fidèles, pour ceux qui ont eu les moyens se sont acquittés de leurs sacrifices, ont prié dans la ferveur et se sont demandés pardon. En entendant, l’année prochaine pour une autre fête de tabaski, qui sera peut-être meilleure, la vie reprend son cours normal.
Mahamadou Diallo(onep)