Depuis près d’un mois, les agriculteurs ont oublié le dur labeur des travaux champêtres. Les récoltes sont finies et les fruits des moissons sont engrangés en lieux sûrs, dans les greniers sur piloris et autres dépôts de conservation de céréales, de denrées légumineuses et même des bottes de foin, etc.
Après plus de quatre mois consacrés au labour des champs, les paysans peuvent enfin jouir des bénéfices de leur abnégation. C’est maintenant le temps du bon vivre et de la bombance. Les jours du marché hebdomadaire, la fête devient plus grandiose avec des soirées chaudes. Mieux, la solidarité et l’hospitalité africaines sont à leurs plus beaux jours. Mariage, baptême, soirées culturelles, randonnées et compétitions inter-villages, bref, tout est prétexte pour faire la fête ! D’où le phénomène du gaspillage des produits des récoltes.
Car, pour s’offrir ces chaudes nuits d’escapade au cœur de l’ambiance, nos laborieux paysans sont amenés à vendre, voire dilapider, une bonne partie de leurs récoltes de mil, haricot, arachide, sorgho, sésame et autres denrées. Pour certains ‘’sarkin noma’’, c’est l’heure de convoler en justes noces pour s’offrir le confort d’une première, 2ème ou 3ème épouse. Tout ceci fait la bonne affaire pour les spéculateurs véreux, toujours en embuscade, prêts à sauter sur l’occasion pour acheter les stocks à vils prix, dans l’espoir de les revendre à des prix exorbitants aux mêmes paysans, trois mois après, pendant la période de soudure.
Jadis, les manifestations culturelles étaient exclusivement agrémentées de rythmes de l’agaïta et du ganga dans le Manga et le Damagaram ; du ‘’douma’’ dans le Gobir-Katsina ; du ‘’dondon’’ et du ‘’kountché-harey’’ dans le Boboye, Fakara et Zigui ; de ‘’bitti-harey’’ dans le Zarmaganda ; du goumbé dans la région du fleuve ; du tendé et de l’akazam dans l’Ader et l’Aïr, etc.
Mais de nos jours, rien de tout de cela ! La musique moderne a fini par supplanter nos rythmes authentiques du terroir, même dans nos lointains hameaux. Et c’est avec le fameux ‘’boomer’’ et la musique moderne que se fait le show au village. Quitte à traumatiser les plus anciens qui, en plus de ne rien comprendre de ces pas de danse endiablés, ne supportent pas ces sons cahoteux distillés par les hauts parleurs. Ah oui, le monde change…
Assane Soumana(onep)