L’on ne saurait évoquer la culture de Zarmaganda sans parler du Bitti harey, un instrument de musique par excellence de cette communauté. La résonance de cet instrument de musique est unique à son genre au point où toute celle ou celui qui appartient à ce terroir ne peut pas ne pas faire des gestes, ne serait-ce qu’inconsciemment. Le Bitti Harey est incontestablement l’identité culturelle propre au Zarmaganda. Il n’est d’ailleurs pas exagéré de dire que le Bitti est l’âme culturelle de cette communauté de destin au regard de la foule que drainent les soirées culturelles de Bitti. Dans cette partie du Niger qu’est le Zarmaganda, le Bitti Harey s’est enraciné dans la tradition culturelle de la communauté.
Quand on parle de cet instrument de musique, deux zones retiennent l’attention de tous ceux qui connaissent véritablement le Bitti. C’est le département de Ouallam et celui de Banibangou. Ces deux départements disposent des acteurs aguerris et ayant une connaissance parfaite du rythme et de la manipulation des éléments qui composent cet ensemble instrumental. Mais avec la pénétration de l’islam et le modernisme, le Bitti Harey ne suscite plus son engouement d’antant. Selon le directeur départemental de la jeunesse et des sports, M. Laouali Adamou par ailleurs représentant de Ministère de la Renaissance culturelle à Ouallam, le département de Ouallam faisait partie des éclaireurs de la région de Tillabéry en matière des us et coutumes. Dans cette diversité culturelle, le Bitti harey s’est imposé comme étant l’activité culturelle phare du Zarmaganda.
Qu’est-ce que le Bitti ?
C’est un instrument de musique typique du Zarmaganda. « A l’origine, l’instrument qu’est Bitti vient de «Sountam » qui lui-même est un instrument traditionnel féminin. De cet instrument, on a évolué pour adopter ce qu’on appelle « Sangala » qui est une calebasse. Cette dernière ne pouvait pas durer pendant longtemps. C’est ainsi que le joueur de « Sangala » avait approché son ami, un artisan qui lui préconisa un autre instrument de musique plus solide et résistant que le « Sangala ». Voilà comment on est arrivé à Bitti », a expliqué M. Laouali Adamou. En plus, ce qu’il faut savoir du Bitti, c’est que celui-ci a plusieurs aires.
Par rapport à la danse Bitti, il y a lieu de relever plusieurs de sorte de danses notamment : la danse Bitti de neuf (9) filles ; celle de Bitti des hommes ; en un seul homme ; deux hommes ; en groupe d’hommes ; la danse Bitti des jeunes filles ; des femmes ; celle des lutteurs ; la danse Bitti de travail collectif ; celle dédiée à la chasse collective ; la danse Bitti des professions ( Soninké ; pêcheur ; tisserand ; forgeron ; cultivateur etc.) ; la danse de possession (folley).
A Ouallam, il existe toujours une troupe de cet instrument traditionnel. Cette troupe d’artistes est dirigée par M. Moumouni Hamani dit N’goyla, qui a quitté Ouallam à notre passage pour aller à Tillabéry dans le cadre des préparatifs de la fête tournante Tillabéry Tchandalo. M. Laouali Adamou nous murmure à l’oreille que Bitti a aussi des secrets que seuls les initiés peuvent percer. ‘’C’est dommage que vous n’ayez pas trouvé sur place l’artiste Moumouni Hamani dit N’goyla’’, a déploré le technicien de la culture qui dispose tout de même une mine d’informations sur le Bitti. Le secret est étant ce qu’il est, M. Adamou se réserve le droit de ne pas outrepasser la limite que les initiés de Bitti l’ont tracée.
Par ailleurs, cette immense richesse culturelle de Ouallam va progressivement disparaitre dans la mesure où rien n’est préparé aussi bien du coté des artistes que de l’Etat. « Le chef d’orchestre de la troupe de danse Bitti n’a initié aucun de ses enfants pour la relève car estimant que la culture est complètement délaissée », explique M. Laouali Adamou. Bref, le Bitti qui est l’âme culturelle du Zarmaganda disparaitrait d’ici quelques années si rien n’est fait pour le maintien et la perpétuation de cette identité culturelle. Les acteurs culturels sont abandonnés à leur sort. Il n’y a des gestes encourageants, encore moins de soutien formel aux artistes. Du coté de l’Etat, on constate que la culture est le parent pauvre de tous les secteurs. Or, il est illusoire d’envisager le développement sans un socle culturel. Le repère culturel constitue un soubassement pour le développement d’un pays. Il est donc urgent pour notre pays de faire son introspection dans le domaine de la culture afin de puiser dans notre tradition les éléments culturels susceptibles de faire bouger les lignes à l’ère de la renaissance culturelle.
Hassane Daouda, Envoyé Spécial(onep)