Située à environ 400 km d’Agadez, chef-lieu de la région et à environ 140 km de Bilma, chef-lieu du département, Fachi est la commune la plus enclavée du département de Bilma. Entourée des dunes de sable, la Commune Rurale de Fachi, constituée d’un village et trois tribus, est distante de tout lieu habité d’au moins 150 km. Cette position rend le transport très difficile et c’est pourquoi, les transporteurs s’intéressent plus aux axes Agadez-Dirkou-Bilma et Agadez-Djado. Ainsi, le ravitaillement de cette partie du kawar est une préoccupation prioritaire pour les communautés en général, mais particulièrement pour les autorités municipales.
C’est ainsi que, en 2011 et en 2017, la commune s’est dotée de deux camions de type Mercedez 2624, mis à la disposition de la population pour le transport des personnes et des biens sur l’axe Fachi-Agadez-Fachi, et au besoin sur les axes reliant Fachi au reste des localités du Département. Ces deux camions ont donné de la joie et de la fierté à cette population dans un contexte très difficile, jusqu’en 2021. Mais, cette opportunité, que représente ces précieux moyens de déplacement n’existe plus depuis 2021 suite à la panne technique des camions dans le grand Sahara. Aucune autorité d’alors, au niveau communal, départemental, régional et national n’a songé à les réparer et redonner de l’espoir à cette population du kawar.
Malgré l’importance de la production de sel, de dattes et des produits maraîchers de Fachi qui pourraient constituer un marché sûr pour les transporteurs et autres acteurs économiques de la région, cet axe est abandonné. Le potentiel économique de la Commune Rurale de Fachi présente à titre illustratif, une production annuelle estimée à environ : 5 000 tonnes de dattes, 10 000 tonnes de sel et 2 000 tonnes de produits maraîchers. Fachi qui pourrait constituer un important pôle économique intéresse malheureusement peu, à cause de son enclavement.
« La difficulté d’accès aux débouchés par manque de camion de transport fait que d’importantes quantités de ces produits se détériorent chaque année à Fachi. Pour se déplacer vers les autres zones du pays il faut attendre les rares véhicules de l’administration en mission ou des partenaires au développement ou encore les rarissimes transporteurs qui, occasionnellement ou périodiquement (après les récoltes des dattes), s’y aventurent. Pour le ravitaillement en produits de première nécessité à partir d’Agadez ou de Dirkou, quelques commerçants de Fachi négocient les services de ces transporteurs pour un coût de transport qui fait le double ou le triple de celui d’Agadez à Bilma. Il en est de même lorsqu’il s’agit de transporter la production annuelle de dattes vers Agadez », explique un ancien administrateur de ladite Commune.
Cette situation avait contraint la population de Fachi à vivre dans une situation de précarité totale qui se caractérise par la cherté du coût de la vie avec ses corollaires d’insécurité alimentaire, d’exode rural, etc. C’est effectivement pour pallier ce problème et pour contribuer de manière modeste à l’allègement de la souffrance de cette population, qu’en 2013, les autorités municipales ont fait du désenclavement de la commune la priorité des priorités du Conseil Municipal. Ainsi, cet organe délibératif de la municipalité avait pris la forte décision, en 2011, d’acheter des camions de transport adaptés au terrain. Le premier camion a été acquis sur les fonds des redevances minières et un comité de gestion a été également mis en place. Cette initiative a produit des effets positifs et trois ans après, soit en 2017, un deuxième camion a été acquis, cette fois-ci grâce à l’appui de l’OIM. « Ces camions ont fonctionné jusqu’en mai 2021 et ont fait la fierté de la population car ils étaient les seuls qui reliaient Fachi aux marchés extérieurs de façon régulière », explique M. Dagouza Issa Goumoussoumi, ancien Maire-Adjoint de la Commune Rurale de Fachi.
A tout point de vue, de 2013 à 2021 au moment où ces camions étaient en activité, l’impact était positif sur plusieurs aspects de la vie de cette population de Fachi, à titre illustratif : les coûts des prix de transport des personnes et de leurs biens sont réduits et supportables par la population ; les productions des dattes, de sel et des produits maraîchers sont acheminées vers les marchés en temps opportun ; le pouvoir d’achat des populations s’est significativement amélioré ; l’accès et l’accessibilité aux produits de première nécessité ont été facilités ; les mouvements des populations sont facilités (il y a possibilité de bien planifier les voyages) etc.
Quelques mois après, les élections de 2021, les camions ont commencé à avoir des pannes à répétition. Finalement, ils ont fini par rester dans les dunes de sable en plein Sahara. Ces camions sont tombés en panne respectivement à 100 km pour l’un et à 50 km pour l’autre de Fachi. Depuis lors, c’est la consternation et la désolation chez la population de Fachi.
L’état actuel des deux camions est critique. Certaines de leurs pièces ont été enlevées ou détruites, ce qui rend la remise en marche de ces véhicules très difficile, ou alors nécessitant des dépenses permettant d’acquérir de nouveaux camions.
L’arrêt de ces camions a replongé ainsi Fachi dans la situation d’avant et la population subit les conséquences de l’enclavement. Ces circonstances relancent les débats, sur la problématique du développement local. « Le développement de la commune de Fachi est intimement lié à son désenclavement, c’est pourquoi il est urgent pour les autorités communales ou les groupes organisés de la commune de trouver les voies et moyens pour acquérir des camions de transport et les mettre sur l’axe Agadez-Fachi », préconise cet ancien administrateur de la Commune Rurale de Fachi. C’est l’occasion pour l’ensemble des acteurs d’engager les démarches nécessaires, aux côtés des autorités coutumières, municipales, et autres personnalités, pour porter la voix de cette population au Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani et au Gouvernement de Transition afin de créer à cette population de meilleures conditions de vie.
Ali Maman ONEP/Agadez