Diversement vécue, la retraite est pourtant inévitable. Chaque travailleur est sensé la vivre. Mais, si elle fait peur à certains au Niger, c’est parce que, non seulement ils ne s’y sont pas bien préparés d’une part, et d’autre part parce que toutes les conditions ne sont pas réunies pour permettre à ces seniors de finir tranquillement leur vie après le service. Dans cet entretien, M. Abdourahamane Mahamadou, un retraité de la fonction publique, ancien cadre du Ministère de l’Enseignement Supérieur (Université de Niamey) nous parle de l’expérience de la retraite et propose quelques idées qui peuvent aider à améliorer la vie des retraités.
Vous êtes retraité de la fonction publique, quelles sont, selon vous, les défis auxquels un agent doit se préparer à affronter au moment de la retraite ?
Le service utilisateur doit informer l’agent peut-être une année avant le départ à la retraite pour que l’agent puisse préparer sa paperasse, mais aussi se préparer psychologiquement même si on connaît la date de départ à la retraite. Cela parce qu’il y a certains qui sont surpris par la retraite parce qu’ils ne se sont pas bien préparés. Mais je pense qu’à partir du moment où un agent connaît l’année de son entrée dans la fonction publique, il est sensé connaitre sa date de départ à la retraite, mais le rappel est toujours important.
Quelles sont les autres difficultés auxquelles les seniors font face une fois à la retraite ?
L’une des difficultés c’est souvent toucher sa première pension. Souvent les gens sont mal préparés et ça prend du temps. Il y a aussi certains aspects psychologiques chez les retraités qui pensent que, quand on va à la retraite, c’est fini, on est privé de certains avantages. Mais je pense que si on arrive à voir sa retraite on doit remercier Dieu parce qu’il n’est pas donné à tout le monde d’aller jusqu’au bout de leurs carrières. Certains décèdent avant la retraite, d’autres tombent malades, etc. C’est donc une chance d’aller à la retraite.
Dans certains pays, des dispositions particulières sont prises pour faciliter la vie aux retraités. Vous avez vu des expériences qui, si elles sont reprises ici seront d’un grand soulagement pour les retraités nigériens. De quoi s’agit-il ?
Au cours de ma carrière j’ai été, dans le cadre des formations dans plusieurs pays, comme le Sénégal, la France, le Mali, le Burundi, etc. Alors dans ces pays, au moment où l’agent part à la retraite, il a une carte de retraite qui lui sert de carte d’identité. La carte est attribuée à tout agent qu’il soit de l’administration publique ou d’entreprise privée. Cette carte, lui procure beaucoup d’avantages. Par exemple, lorsque le retraité va dans une pharmacie ou dans une alimentation générale, cette carte lui permet d’avoir des réductions sur les prix des médicaments ou des denrées alimentaires. Dans ces pays que j’ai visités, les retraités ne paient pas les produits aux mêmes pris que les fonctionnaires en exercice. Ces réductions de prix tiennent aussi compte de la taille de la famille du retraité (nombre de femmes et ou d’enfants à charge). Ici au Niger, on n’a pas encore ce genre de carte et je ne sais pas si la CARENI réfléchit à cela. En plus de ces avantages sur les prix, les retraités bénéficient d’autres facilités auprès des sociétés de distribution d’eau et d’électricité. Dans ces mêmes pays que j’ai visités, il est très difficile de couper la fourniture à un retraité. En effet, ces sociétés ont mis en place des services spécialement dédiés aux retraités. En raison de ce qu’ils ont fait pour le pays, les retraités sont respectés, partout où ils se présentent ils sont servis avant ceux qui sont là. En outre, même les tarifs de services d’eau et d’électricité ne sont pas les mêmes. Il y a certaines rubriques des tarifs qui ne sont pas appliquées sur les retraités. Et avant de couper la fourniture d’eau ou d’électricité, on envoie des lettres d’avertissement. Tout cela s’inscrit dans le cadre du respect à ces gens qui ont servi la nation. Je pense que la Nigelec et la SNE doivent penser à adopter ce genre de mesures.
Pensez-vous que ces mesures sont réalisables au Niger ?
Absolument. Tout est question de volonté. On a vu que par le passé, c’était un véritable calvaire pour toucher sa pension. De par le passé, on se rappelle des longues rangées durant de longues heures auxquelles étaient soumis les retraités au niveau de la caisse Nouveau Marché. Mais des améliorations ont été apportées et c’est tant mieux. On ne peut pas, du fait de leur âge demander à des retraités de rester faire le rang pendant un long moment.
En tant que retraité que pensez- vous de la perception des jeunes fonctionnaires sur les retraités au Niger ?
En fait au Niger, c’est seulement dans le service où le retraité a servi qu’il suscite le respect. Mais, ça ne doit pas être ainsi, étant donné que l’agent retraité a servi la nation, il doit mériter le même respect partout où il va dans le pays. Quel que soit le service qu’il est allé demander, le retraité doit être satisfait. On ne doit pas le mettre dans les mêmes conditions que les jeunes et les autres. Et, je pense que les banques au Niger doivent songer à ouvrir des guichets dédiés spécialement aux retraités et à défaut, elles doivent les désintéressés aussitôt qu’ils se présentent au guichet. Cela doit se faire partout où les retraités partent demander un service. On ne peut pas soumettre ces personnes aux mêmes conditions que les autres.
Propos recueillis par Siradji Sanda (ONEP)