Déchets plastiques, eaux stagnantes, objets usés, garages automobiles, débris de toutes sortes, telles sont les différents visages qu’affiche la ceinture verte de Niamey. Cet espace, long de plusieurs kilomètres, a été créé par des dirigeants visionnaires qui voulaient en faire le principal pourvoyeur d’oxygène à la population de la capitale. Aujourd’hui, c’est cette même population qui déboise, morcele, occupe et salit la ceinture verte qu’elle a le devoir de protéger de toutes ses forces.
Sur le terrain, le constat n’est guère reluisant. Cette bande verte censée protéger la ville des intempéries est mise à rude épreuve du fait notamment du déversement massif des déchets liquides et solides. Installée depuis plus de trois (3) décennies avec environ 2500 hectares, la ceinture verte de Niamey est réduite à une portion congrue, devenant aujourd’hui un dépotoir public géant, une poubelle à ciel ouvert.
Pourtant la ceinture verte de Niamey est le modèle de foresterie urbaine créé au Niger depuis 1965 par les autorités nigériennes en vue de constituer une barrière de protection contre les intempéries et pour une amélioration du cadre de vie. Elle s’étend sur une bande discontinue en quelques endroits et constitue le plus grand massif forestier artificiel périurbain du Niger. Malheureusement, depuis plusieurs années, cette bande verte riche de centaines de milliers d’arbres et arbustes fait face à toutes formes de menaces. Mais les plus inquiétantes sont l’insécurité récurrente ; l’insalubrité due au déversement illégal de déchets. En effet, en lieu et place de la ceinture verte située entre la Blue zone et le rond-point police secours, se trouve aujourd’hui une montagne de déchets dégageant une odeur nauséabonde. C’est dans cet endroit insalubre que s’est créé une sorte de village, un melting-pot dirigé par un chef de village, Maigari Ali Mody.
D’après le sieur Ali Mody les responsables de cette impressionnante montagne d’ordures ne sont autres que les agents de la commune 3 de Niamey. « Ce sont eux qui viennent déverser les ordures dans cette partie de la ceinture, à côté de nos habitations », a-t-il martelé avec véhémence. « Nous relevons de la commune 4, mais c’est les services communaux de Niamey 3 qui viennent nous assaillir avec ces ordures. Madame, les ordures que vous voyez ne viennent pas de nous. Nous ne pouvons pas résider dans un endroit et le détruire ! Cet espace est notre havre et nous sommes conscients de l’importance de cette végétation », a-t-il insisté.
Relativement à la question sécuritaire, le chef de village Ali Mody rassure que de leur côté, ce problème ne se pose pas. Toutefois, il affirme avoir été plusieurs fois témoin d’agression sur des personnes au niveau de la ceinture verte, du côté de Bassora. « J’ai eu à secourir et appeler plusieurs fois la police pour venir appréhender des bandits dans cette partie-là de la ceinture. A pareille heure (soit 11H50) madame, si vous vous rendez dans cette partie, il est possible qu’on vous agresse », a-t-il déclaré. Ce cas n’est qu’un cas parmi tant d’autres qui parsèment l’emprise de la ceinture verte.
Les objectifs essentiels de la ceinture sont la protection de la ville de Niamey contre les intempéries, l’amélioration du cadre de vie des populations, l’amélioration de la qualité de l’environnement…Aujourd’hui, force est de constater que ces objectifs sont compromis. La ceinture verte était pourtant un bel endroit véritablement vert, libérant l’oxygène à profusion ! Des actions ont été entreprises par les autorités pour freiner le phénomène d’occupation et de dégradation de ce joyau. On se rappelle qu’en 2004, plusieurs actions ont été entreprises pour préserver cette bande verte. A titre illustratif, il y a eu l’adoption du décret du 9 juillet 2004 portant protection des espaces verts et des ceintures vertes. On note aussi l’organisation d’un forum national sur la gestion durable de la ceinture verte de Niamey du 15 au 17 décembre 2008. Néanmoins, toutes ces mesures n’ont pas stoppé la pression humaine sur la ceinture verte. Elle s’est d’ailleurs accrue, exposant ce réservoir d’oxygène à une disparition lente et certaine. La question de la sauvegarde de la ceinture doit ainsi être au cœur des préoccupations des autorités nationales via le Ministère en charge de l’Environnement afin que ce patrimoine emblématique ou ce qu’il en reste soit préservé.
Rahila Tagou (ONEP)