Le lancement de la mise en production de la phase II du bloc d’Agadem est un moment historique pour le Niger qui sera désormais inscrit parmi les pays exportateurs du pétrole brut. Elle permettra à notre pays le Niger l’ouverture d’opportunités pour la création d’emploi à la jeunesse à travers des pôles d’activités économiques. Pour les communautés locales, la mise en production de la phase II du bloc d’Agadem aura certainement des impacts comme la connexion en énergie électrique pour développer les activités socio-économiques ; la construction des centres de santé ; l’approvisionnement en eau potable ; la construction des classes en matériaux définitifs. Dans cette interview, le directeur général des Hydrocarbures revient sur la portée historique de cet événement majeur ainsi que ses répercussions sur le plan économique et social.
Monsieur le directeur général, dans quelques instants les autorités nigériennes vont lancer officiellement la mise en production de la phase II du bloc d’Agadem, quelle signification revêt cet événement pour notre pays ?
En effet, je suis très fier de me tenir devant ce complexe gigantesque en compagnie des équipes avec lesquelles nous avons travaillé d’arrache-pied pendant trois (3) ans sinon plus, en collaboration avec nos partenaires de la CNPCNP pour faire naitre ce projet. C’est un projet gigantesque en ce sens qu’il est d’ailleurs le plus grand projet que nous réalisons au Niger. C’est un investissement de plus de six (6) milliards de dollars qui a généré des milliers d’emplois, d’où son impact sur le plan économique. C’est dire que l’événement est historique et je suis content que les autorités nigériennes puissent effectuer le déplacement de Koulélé pour l’inauguration officielle de la mise en production de la phase II du bloc d’Agadem, qui va désormais lancer notre pays sur une nouvelle aventure pétrolière. Le projet du boc d’Agadem a deux composantes majeures : la composante amont a consisté à forer et développer les différents puits qui vont assurer la production, réaliser les installations de surface et de production et la deuxième composante qu’est le pipeline dont le rôle principal est de transporter les quantités produites du pétrole brut d’Agadem au port de Semé (Benin). Ces deux travaux ont généré plus de 10.000 emplois (9.000 emplois sur la partie amont et 2.500 emplois sur la partie pipeline). Plus de 400 sociétés locales qui ont eu des contrats de sous-traitance pour un volume cumulé de plus de 700 millions de dollars.
La production du pétrole brut obéit à un processus de traitement pour s’assurer de la qualité du produit final, est-ce que toutes les étapes du processus sont scrupuleusement respectées afin que le pétrole brut nigérien soit compétitif sur le marché international ?
De 2008 à nos jours, le Niger a beaucoup appris de l’exploitation pétrolière. L’administration en charge du pétrole que nous représentons a beaucoup œuvré main dans la main avec nos partenaires pour que la qualité de la production et la qualité du produit soient assurées. Aujourd’hui, on peut dire sans hésitation au peuple nigérien que nous sommes en mesure de certifier que toutes les opérations réalisées sur les sites d’Agadem concourent à la préservation des intérêts de l’Etat du Niger. Nous donnons cette assurance parce que nous travaillons étroitement avec nos partenaires pour la qualité du travail accompli. Nous avons en permanence des agents sur le terrain, que ça soit en phase de construction ou en phase d’exploitation. A titre illustratif, sur le site de la station CPF de Koulélé, nous aurons en permanence sept (7) agents de l’Etat sur différents points stratégiques qui vont assurer les contrôles essentiels. Des inspecteurs pétroliers ont été formés par l’Etat. Ces inspecteurs ont été certifiés au plan international avec toutes les compétences pour superviser le processus de bout en bout. Actuellement, nous avons des opérations de métrologie qui sont en cours par l’Agence Nationale de Normalisation, de la Métrologie et de la Certification. Ce sont eux qui vont donner le quitus pour dire que les compteurs qui vont déterminer les quantités qui passent pour la commercialisation donnent les valeurs exactes. L’agence en a les compétences nécessaires pour la réalisation de travail. C’est dire que l’Etat sera le garant de toutes les opérations qui se font au niveau d’Agadem.
Sur les différents sites du bloc d’Agadem, les employés nigériens travaillent aux cotés des expatriés chinois de la société CNPCNP, quelles sont les dispositions qui ont été prises pour protéger l’emploi des Nigériens et améliorer leurs conditions de vie et de travail sur le terrain ?
Dans le cadre de la protection et de l’amélioration des conditions de vie des travailleurs sur les sites du bloc d’Agadem, plusieurs réformes ont été engagées depuis deux (2) ans. Vous pouvez d’ailleurs discuter avec les différents travailleurs de la CNPCNP pour en savoir plus. Nous sommes en train de travailler sur le transfert de compétences qui passe par la promotion des Nigériens. Ceux-ci ont de plus en plus des qualifications précises pour la protection de leur emploi. Il y’a des Nigériens dans cette phase II de la mise en production du bloc d’Agadem, qui vont être des superviseurs de site ; des supers intendants ; des responsables sur différents sites. Ce sont des discussions fermes que nous avons eu avec nos partenaires et nous avons pu obtenir cette implication des Nigériens. En ce qui concerne le coté recrutement, nous avons beaucoup amélioré le recrutement des Nigériens. A ce niveau, la plupart des opérateurs seront locaux et d’ici un (1) an, l’ensemble des opérateurs vont être Nigériens. Voilà entre autres des résultats tangibles auxquels nous sommes parvenus.
Comment se porte aujourd’hui le partenariat entre le Niger et la Chine par rapport à l’exploitation pétrolière ?
Ce partenariat est excellent. Aujourd’hui, la Chine est un partenaire privilégié pour le Niger dans le domaine de l’économie en général et dans le secteur pétrolier en particulier. La mise en production de la phase II vient consolider la phase I qui a démarré en 2011. Elle vient renforcer la position du Niger sur l’échiquier pétrolier international. Je tiens à dire que cette production qui passe à 110.000 barils par jour garantit à notre pays un niveau qui va au-delà de certains pays qui sont membres de l’Organisation des Pays Exportateurs du Pétrole (OPEP). Il faut que cela soit compris par les Nigériens. C’est un grand pas que nous faisons et nous avons d’autres projets qui seront développés avec notre partenaire chinois. Nous sommes confiants sur le fait que cette aventure ne fait que démarrer.
Lorsque le pétrole brut nigérien sera acheminé à travers le pipeline export jusqu’au port de Semé au Bénin, comment va s’effectuer la commercialisation ?
Je tiens à apporter cette nuance pour que les Nigériens comprennent le rôle de chacun. Nous sommes partenaires avec la CNPCNP avec laquelle nous travaillons sur ce projet. Mais c’est le Niger qui est producteur et qui a la propriété du pétrole brut. En effet, la société WAPCO à qui, l’Etat a confié à travers une autorisation de transport intérieur, la charge de construire et d’exploiter le pipeline n’est qu’un transporteur. Lorsque nous produisons, la société WAPCO va juste se charger de prendre le pétrole brut à partir de la station initiale de Koulélé pour l’amener à Semé au Bénin. Le travail de cette société est terminé à partir du port. C’est le Niger qui, étant producteur, va se charger de la gestion de la commercialisation du pétrole brut. A cet effet, il y a lieu de préciser que tous les mécanismes juridiques sont en train d’être gérés entre les trois parties. L’Etat du Niger connait ses quantités. Sur une production totale de 100.000 barils, nous avons les différentes taxes qui sont prélevées ; la part de notre participation dans le consortium. Ses quantités sont très bien connues et déterminées. Bref, tout le mécanisme de commercialisation est en train d’être déployé pour que l’Etat puisse tirer le maximum de bénéfice de cette commercialisation.
Quel message avez-vous à lancer à l’endroit de la population nigérienne à cette étape qui vient d’être franchie dans le domaine pétrolier ?
Le premier message adressé aux populations nigériennes, c’est d’être fières que nous puissions arriver à cette étape extrêmement importante dans l’histoire de l’exploitation pétrolière au Niger en dépit de toutes les contraintes auxquelles notre pays est exposé, particulièrement en cette période. Nous tenons par ailleurs à assurer les populations du Niger que toutes les dispositions sont prises par les autorités pour que cette ressource puisse profiter au maximum des Nigériens. C’est pourquoi, nous demandons à tous les Nigériens de s’approprier ces installations surtout le pipeline qui traverse notre territoire sur cinq (5) régions sur plus de 1200 km.
Hassane Daouda (ONEP), Envoyé Spécial