L’élaboration des stratégies de gestion du risque à tous les niveaux figure en bonne place de la lettre de mission reçue par le ministère de l’Action Humanitaire et de la Gestion des Catastrophes ; Mme la ministre, à ce jour quelles sont les actions réalisées relativement à cette attente ?
Permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour cette opportunité que vous me donnez pour partager, à travers les colonnes du Sahel, les réalisations et perspectives de mon département ministériel en matière d’action humanitaire et de gestion des catastrophes.
Pour rappel, mon département ministériel est chargé, en relation avec les ministères concernés, de la conception, de l’élaboration, de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation de la politique nationale en matière d’action humanitaire et de gestion des catastrophes, conformément aux orientations définies par le CNSP.
Comme vous le savez, le Niger, à l’instar de la plupart des pays sahéliens, est confronté à un défi croissant lié d’une part aux aléas naturels tels que les sécheresses, les inondations, les feux de brousse et l’érosion hydrique et éolienne, et d’autre part aux crises humanitaires. Voilà pourquoi depuis notre prise de fonction, le ministère a défini une feuille de route stratégique pour répondre aux besoins pressant des populations et préparer le pays à faire face aux situations d’urgence.
Au vu du caractère transversal des questions humanitaires et de gestion des catastrophes, nous avons entamé des actions avec toutes les parties prenantes. Il y a parmi les œuvres initiées, la mise en œuvre du plan d’action de la politique nationale de l’action humanitaire et de la gestion des catastrophes qui est un cadre de concertation et d’action pour assurer le leadership de l’Etat dans la chaîne de gestion des catastrophes, prévention, préparation, secours, réponse, relèvement précoce, NEXUS UDP, etc. Il faut noter également la révision de la Stratégie Nationale de Réduction des Risques de Catastrophe (SNRRC) et son Plan d’Actions, qui était une priorité pour nous assurer que notre réponse aux catastrophes et basée sur des meilleures pratiques actuelles et adaptées aux conditions locales.
Ensuite, nous avons l’opérationnalisation de la Plateforme Nationale de Réduction des Risques de Catastrophes avec l’arrêté N° 002/MAH/GC du 15 mars 2024 mettant en place la plateforme intégrée pour coordonner les efforts de tous les acteurs et qui vise à réduire la vulnérabilité des populations, à améliorer la résilience des communautés et à assurer une réponse rapide et efficiente face aux crises. Au nombre des actions engagées il y a aussi, la mise en place d’une base de données sur les risques de catastrophes au Niger au sein du ministère en collaboration avec le Centre Régional AGRHYMET pour centraliser et actualiser les informations critiques concernant les risques naturels et anthropiques. Enfin nous avons la mise à jour des Plans de contingence Multirisques dans les régions afin de préparer les communautés à faire face à d’éventuelles catastrophes.
Ces stratégies et outils, qui cadrent parfaitement avec la vision du Chef de l’Etat, sont entre autres documents qui constituent le socle sur lequel reposent les actions de mon département ministériel.
A travers quelles démarches le ministère de l’Action Humanitaire et de la Gestion des Catastrophes va-t-il amener les communautés à s’impliquer dans la mise en œuvre de ses différentes stratégies ?
Les communautés sont au centre de ce que nous faisons et sont acteurs clés dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation de toutes les actions que nous menons. Pour formaliser et garantir leur participation active, nous envisageons élaborer une Stratégie de Redevabilité et de l’engagement communautaire.
En attendant sa finalisation et sa mise en application, nous avons mené des actions concrètes sur le terrain, qui posent les jalons de la pleine implication des membres de la communauté dans toute question qui les concerne. Il s’agit notamment de la redynamisation des structures communautaires avec la formation de 30 Observatoires de Suivi de la Vulnérabilité (OSV) et 120 Structures Communautaires d’Alerte Précoce et de Réponse aux Urgences (SCAP/RU) dotées de smartphones pour la remontée rapide d’informations cruciales ; la mise en place et l’animation des comités de gestion de plaintes dans les sites des personnes déplacées internes. À ces actions s’ajoutent celles relatives à la formation de 400 femmes leaders sur la prévention et la gestion de crises et catastrophes ; la sensibilisation de 13.000 membres de la communauté sur la prévention et la gestion des risques de catastrophes ; la sensibilisation des communautés sur les risques liés aux inondations qui se déroule sur l’étendue du territoire nigérien.
Comme vous le voyez, notre démarche est basée sur la concertation et l’implication des communautés à travers des structures bien organisées. Les actions citées ci-haut montrent combien les communautés sont impliquées dans nos actions et combien il est important qu’elles soient au centre de tout ce que nous faisons pour un impact réel.
Nous avons déjà des résultats sur le terrain. Pour parler d’actualité, dans le cadre des inondations par exemple, les communautés participent aux sensibilisations sur les risques liés aux fortes pluies et sont à la base de la remontée des informations sur les inondations au niveau de leurs localités. Ils ne sont plus des observateurs, mais des acteurs clés. Lors de ma dernière visite à Maradi et à Zinder, j’ai pu constater l’engagement communautaire et la qualité de la collaboration entre les responsables régionaux et les structures communautaires.
Mme la ministre, qu’est ce qui est visé à travers le renforcement des mécanismes de suivi et de gestion des personnes en situation de vulnérabilité, qui constitue une des actions inscrites dans le cahier des charges de votre département ministériel ?
Notre pays connaît depuis près d’une décennie des mouvements de populations dus, en grande partie, à l’insécurité dans les régions de Diffa, Tillabéri, Maradi et Tahoua et aux catastrophes naturelles comme les inondations, ce qui a entraîné des déplacements massifs de populations.
Depuis le mois de janvier, nous avons lancé l’enregistrement biométrique des personnes déplacées internes afin de disposer de données précises pour une réponse plus efficace. Nous prévoyons de créer une base de données dynamique qui contiendra des informations détaillées sur les ménages et les individus facilitant ainsi l’allocation des ressources et la coordination des interventions.
En plus du travail que nous faisons sur la question des déplacées internes, mon département ministériel contribue fortement aux données du cadre harmonisé qui nous permet d’avoir une visibilité à l’échelle nationale sur les couches vulnérables, de leur répartition géographique jusqu’aux types de vulnérabilités. Ces informations sont cruciales pour améliorer les perspectives d’emplois pour les couches défavorisées et pour réduire la pauvreté de manière durable.
De manière générale, ce que nous visons à travers le renforcement des mécanismes de suivi et de gestion des personnes en situation de vulnérabilité, c’est surtout d’avoir une maîtrise du nombre de personnes, de connaître leurs besoins afin de leur apporter les réponses appropriées.
Mme la ministre, quelle est précisément la vision du CNSP et du Gouvernement pour réduire la pauvreté et la vulnérabilité ?
Le vison du Chef de l’Etat a toujours été claire : pas question de continuer l’éternel assistanat qui depuis des décennies n’a pas sorti le Niger de l’ornière. Il l’a encore rappelé dans le document de vision, je cite : « Mon ambition est de bâtir un Niger où les Nigériennes et les Nigériens, unis et solidaires, décident souverainement pour notre patrie et dans l’intérêt supérieur de notre pays ». Cette vision du chef de l’État est la fondation même de toutes les stratégies que nous développons et de toutes les actions que nous mettons en œuvre.
Pour atteindre cet objectif, le ministère travaille à la mise en place de programmes de protection sociale non contributifs à travers les filets sociaux productifs et encourage des initiatives qui promeuvent la résilience et l’autonomisation économique des populations. Aussi, mon département ministériel est en train d’œuvrer pour l’implémentation de l’approche NEXUS UDP qui est une nouvelle façon de travailler qui fait le lien entre l’urgence, le développement et la paix pour s’attaquer aux causes profondes des vulnérabilités afin d’assurer en même temps l’assistance humanitaire pour sauver des vies, favoriser le relèvement et renforcer la résilience des communautés affectées.
C’est pourquoi, depuis ma prise de fonction, nous travaillons directement avec les communautés dans le but de les rendre résilientes et autonomes dans la prise en charge de leurs besoins quotidiens. C’est ce que nous sommes en train de matérialiser dans la stratégie sur les solutions durables pour les personnes déplacées internes et les communautés hôtes déjà élaborée et qui est en cours d’adoption. Cette stratégie cadre parfaitement avec la vision du Chef de l’État.
Pour conclure, permettez de rappeler qu’en plus des documents stratégiques et des actions opérationnelles réalisées, mon département ministériel se tourne vers une refondation de l’action humanitaire et la gestion des catastrophes au Niger de façon à répondre aux exigences d’un monde en perpétuelle mutation, et cela dans le respect du cahier des charges à moi confié par Son Excellence le Général de Brigade Abdourahamane Tiani, Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, Chef de l’Etat et sous la coordination de Son Excellence Mahamane Ali Lamine Zeine, Premier Ministre.
Réalisée par Souley Moutari (ONEP)