Du 13 au 16 février 2018 se sont tenus à Niamey les états généraux du foncier rural au Niger. A l’issue de cette rencontre, plusieurs recommandations ont été élaborées par les participants. Près de 20 mois après ces assises, où en sommes-nous par rapport à ces recommandations ?
À l’issue des débats et discussions, qui ont émaillé les assises des états généraux du foncier rural au Niger, les participants ont proposé des pistes pour la formulation d’une véritable politique foncière nationale visionnaire et fonctionnelle. Ils ont aussi convenu d’une feuille de route devant guider la préparation de ladite politique. Les états généraux font partie du processus d’élaboration de la politique foncière de notre pays. C’est d’ailleurs un élément déterminant de cette politique. Parce que c’est à ce niveau que l’idée d’élaboration de cette politique a été acceptée par l’ensemble des acteurs. Les recommandations fortes à l’issue de cette rencontre, tournent autour de la nécessité de s’accorder sur le fait que le Niger dispose d’un certain nombre d’arsenal, par rapport à la gestion foncière et cela pendant, après la colonisation et jusqu’à nos jours. Ce qui d’ailleurs a donné naissance aux principes d’orientation du Code rural.
Le 2ème élément, qui était ressorti, c’est la reconnaissance, par les états généraux, du changement des climats, l’environnement politique, le développement démographique, le développement urbain, tous ces changements contribuent à consommer et à fragilisé le foncier. Au vu de toutes ces questions, le Niger se trouve dans l’obligation de disposer d’une politique foncière adaptée à ces réalités. Ces assises ont aussi fait ressortir l’incohérence des différentes politiques sectorielles.
Plusieurs de ces segments ne cadrent pas avec un quelconque principe d’orientation. C’est ainsi qu’une recommandation, dans ce sens, a été élaborée qui dit que, la politique foncière, qui va être élaborée, doit être, le cadre fédérateur de l’ensemble des politiques qui régissent le foncier rural au Niger. Au-delà, il faut aussi quelques axes relatifs au foncier urbain. Une autre forte recommandation, sortie des états généraux c’est de faire en sorte que le processus soit inclusif. Donc, faire en sorte que tous les acteurs soient considérés, consultés et que leurs points de vue soient pris en compte dans l’élaboration de la nouvelle politique foncière. Il est ressorti aussi la nécessité que la politique prenne en compte, les couches vulnérables, tels que les femmes, les jeunes, le pastoralisme, etc. bref des aspects que les principes d’orientation ont ignoré ou omis. Ainsi, cette politique foncière va nous donner l’opportunité de faire un large balayage. Ils avaient aussi recommandé que dans la conduite de ce processus de tenir compte de l’environnement.
La politique foncière nationale sera-t-elle élaborée uniquement sur la base des réalités nationales ?
N’oublions pas qu’au niveau international, il y a les directives volontaires, qui est une sorte de consensus qui s’est dégagé, au niveau international, et qui donne une orientation sur comment on doit gérer les ressources naturelles. Sur le plan continental, la question foncière a été posée sur la table. Car sur la base de la supposition que c’est en Afrique qu’il existe beaucoup de terres non exploitées, certains ont suggéré que des privés viennent mettre en valeur ces terres. C’est ainsi qu’immédiatement l’Union africaine a pris des mesures, rappelé les lignes directrices qui permettront aux Etats de s’accorder sur cette gestion des ressources naturelles. La politique du Niger doit donc aussi s’articuler autour de ces directives.
En termes de gestion de ressources naturelles, je pense que le Niger ne doit pas être fermé. Il a aussi été constaté qu’il ne s’agit pas de disposer d’une politique, il faut surtout penser à sa mise en œuvre, qui ne doit pas poser problème. Pour cela, il y a nécessité d’une large diffusion du processus, une appropriation, par les différents acteurs dudit processus mais surtout une forte adhésion au processus.
C’est justement cela qui a poussé à l’organisation d’ateliers sectoriels et thématiques. En effet, des rencontres ont regroupé des Chefs traditionnels, des pasteurs nomades, des agriculteurs, les ministères clés, en charge des ressources naturelles et du développement rural, des agents de l’Etat, des députés nationaux, à travers la Commission du développement rural, bref il y a eu plusieurs rencontres avec de nombreux acteurs, pour que les gens soient au courant, qu’ils apportent leurs contributions pour l’élaboration de cette politique nationale foncière. Je n’oublie pas de signaler aussi la composition du Comité de 44 personnes, chargé de produire un document, qui prendra en charge les préoccupations des uns est des autres et qu’il y ait un large consensus autour de ce qui va être écrit dans le document.
A quoi ont abouti toutes ces recommandations ?
Toutes ces recommandations ont abouti au recrutement du consultant et à l’élaboration du Draft zéro de la politique foncière. A partir de ce Draft, il y a eu un atelier d’abord pour présenter aux gens les 4 axes stratégiques dégagés. Par la suite, il y a eu des ateliers régionaux, pour que le contenu de cette politique soit diffusé et qu’il ait des questions d’enrichissement dudit document. Après les 8 ateliers, il a été organisé un autre à Niamey, concernant la société civile, pour que ce qui a été dit et retenu au niveau des régions, soit remonté au niveau national, c’était cela, entre autres le but de cet atelier organisé du 7 au 8 octobre dernier, à Niamey.
A l’issue des travaux des réformes ont été proposées, comme celle de créer un Haut-Commissariat chargé de la question du foncier rural, qui sera placé sous la tutelle de la Présidence de la République. Ce qui permettra à la structure qui va conduire le processus de mieux le gérer, d’être renforcée en ressources humaines, en moyens financiers mais également en termes d’expertise pour pouvoir mettre en œuvre cette politique foncière.
Au niveau du financement, il a été proposé un fonds conséquent pour les questions foncières. Ce fonds doit avoir un compte spécial qui lui sera alloué et alimenté à partir de plusieurs sources de financement. Tout cela pour permettre à ce que la question foncière soit traitée avec la plus grande valeur due à son importance mais aussi avec beaucoup de moyens, car n’oublions pas que la base du développement c’est le foncier. Ce document de politique nationale foncière doit regrouper l’ensemble des politiques sectorielles.
Quelle sera la prochaine étape, après celle du Draft Zéro ?
Rappelons d’abord qu’au cours du dernier atelier tenu, plusieurs questions ont été soulevées et qui méritent d’être retravailler. Il y a, par exemple, celle relative aux terres communautaires. Une équipe technique a été mise en place pour élaborer et finaliser le document. Cette équipe va travailler pour prendre en compte l’ensemble des contributions, en provenance des régions, ce qui nous donnera, l’avant-projet de la politique foncière du Niger.
C’est cet avant-projet qui va être vulgarisé. Il va donc retourner au niveau des régions, pour que tous les acteurs puissent voir, si effectivement leurs contributions ont été prises en compte, où encore s’il y a des aspects qui méritent d’être revus ou éclaircis. Car, comme on le dit, en politique foncière, chaque mot a son sens. Donc, la population a intérêt à avoir la même compréhension des mots, du contenu du document, pour éviter des interprétations personnelles. C’est donc, pour cela que l’avant-projet va retourner, encore, en vulgarisation et à la fin on va revenir avec d’autres amendements, que l’équipe prendra en charge.
C’est avec cette dernière version que les gens iront vers l’Etat, qui a mandaté la Comité National d’Elaboration de la Politique foncière, pour le remettre au ministre en charge de l’Agriculture et de l’Elevage, qui préside ledit Comité, qui lui-même le remettra au gouvernement. Après examen du document par le gouvernement, il sera remis au CESOC, pour analyse, après quoi, le document parviendra à l’assemblée nationale pour sa validation et son adoption.
Réalisée par Mahamadou Diallo(onep)