
Commissaire-Colonel Abarchi Ousmane
Monsieur le ministre, comment se porte le secteur des Mines depuis l’avènement du CNSP, sachant que c’est dans ce domaine que doit se traduire concrètement et avec force l’affirmation de notre souveraineté pour le bonheur de notre peuple ?
Mes remerciements à la RTN qui nous offre cette opportunité de parler du secteur minier dans un devoir de transparence et de redevabilité envers le peuple nigérien qui continue à nous accorder sa confiance. Je voudrais également souhaiter une bonne et heureuse année au peuple nigérien, une année de paix, de santé de prospérité pour notre pays. Il vous souviendra donc que c’est suite au réaménagement technique du gouvernement en date du 19 février 2024 que nous avons eu la charge du Ministère des Mines. Le constat du secteur avant le 26 juillet 2023 était un secteur où il y avait des difficultés de recouvrement des recettes au profit de l’Etat, donc des arriérés d’impôts de certaines sociétés minières y compris des arriérés de redevance minière. Il y avait également la non application, ou disons le contournement des dispositions légales et réglementaires de notre Code minier par certaines sociétés minières. Il y a aussi la grande attente de notre peuple pour la mise en valeur de certains gisements sur lesquels il pouvait assoir son développement. Ces gisements étaient mis au cocon par certains opérateurs, en l’occurrence certaines multinationales qui refusaient de les exploiter, contrairement aux dispositions légales qui leur ont attribué ces permis d’exploitation. Depuis notre prise de fonction, nous avons reçu notre lettre de mission de la part du Président du CNSP, Chef de l’Etat, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani. Les attentes dans cette lettre de mission se résumaient à trois points. Il s’agit, premièrement, de renforcer le dispositif d’encadrement de l’exploitation des ressources extractives afin d’améliorer sa contribution à l’économie nationale. Deuxièmement, définir un cadre favorable aux investissements pour la diversification de l’exploitation des ressources minières. Troisièmement, mettre en place un cadre approprié de mesure des résultats et d’appréciation de la performance des actions du Ministère des Mines. Et, depuis la date où nous avons été investi de cette charge, le secteur minier a bénéficié d’une attention particulière des autorités en vue de mieux assoir notre souveraineté sur nos ressources naturelles. Le secteur se porte bien, il fait la fierté des Nigériens tant de l’intérieur que de la diaspora. Il fait la fierté des africains en général, notamment de nos concitoyens de la Confédération de l’AES. Le secteur a aussi bénéficié de la révision de son cadre légal, d’un cadre de travail beaucoup plus accueillant et convivial. Il s’agit donc de l’immeuble qui abrite actuellement le Ministère en charge des Mines. Il a été fait l’état des lieux des différents titres miniers qui ont été attribués aux différents opérateurs. Cet état des lieux se poursuit actuellement. Nous avons également entrepris des visites sur le terrain où nous avons pu constater de visu ce qui se passe réellement dans le cadre minier. Nous avons aussi fait beaucoup de recouvrements dans le cadre des recettes minières au profit du budget national.
Quelles sont les mesures prises pour renforcer le dispositif d’encadrement des ressources extractives afin d’améliorer leur apport à l’économie nationale ? Pouvez-vous nous décliner les grandes lignes du nouveau Code minier en chantier avec notre nouvelle orientation politique et ce dans l’intérêt de notre pays ?
L’analyse diagnostique du secteur minier a montré une faiblesse de la gouvernance du secteur, le faible développement de notre potentiel minier, le faible développement de la chaine de valeur et une diversification insuffisante des différentes substances exploitées dans notre pays. Il y a également une prise en charge insuffisante de la gestion durable de l’environnement minier. Voilà ce que le diagnostic du secteur minier nous montre. Face à ce diagnostic, des mesures ont été mises en place. Il s’agit du renforcement du cadre légal. Dans cette optique, il a été adopté l’ordonnance 2024 34 du 2 août 2024 relative aux contenus locaux dans le secteur des Mines et des hydrocarbures au Niger. Cette ordonnance concerne l’offre d’emploi aux nationaux. Elle concerne également la sous-traitance, la fourniture des biens et services par les entreprises nationales au profit des entreprises qui font l’exploitation minière et dans les hydrocarbures. Il y a également l’adoption de l’ordonnance N° 2024 37 du 8 août 2024 modifiant et complétant la loi N° 2022 033 du 5 juillet 2022 portant loi minière. Dans le cadre de l’adoption de cette ordonnance, il s’agissait de limiter les exonérations fiscales qui sont attribuées aux entreprises qui font de la recherche minière. Donc, ces exonérations ont été limitées aux phases de recherche et aux phases de construction des Mines. Il y a également des mesures sur la hausse de 10% à 15% de la participation gratuite de l’Etat aux sociétés minières qui sont créées après les recherches par des opérateurs étrangers. L’autre point également à mettre à l’actif de cette modification du Code minier, c’est la promotion des entreprises locales par les autorisations semi mécanisées. Ce qu’on appelle les autorisations semi mécanisées, ce sont des exploitations qui permettent aux opérateurs d’aller directement à la phase d’exploitation à petite échelle sans pouvoir passer par la phase de recherche de détermination des gisements et de construction de petite ou de grande mine. Ces exploitations semi mécanisées ont été exclusivement réservées aux entreprises qui ont une participation à majorité détenue par des Nigériens. Il y a également des dispositions concernant la protection de l’environnement où des obligations strictes en matière de réhabilitation des sites miniers ont été introduites dans l’ordonnance modifiant le Code minier. Enfin, il y a des contributions financières, toujours dans le cadre de l’environnement, pour l’exploitation des nappes fossiles. Ici, il s’était agi de transposer les dispositions du Code de l’eau nigérien au niveau du Code minier pour faire en sorte que le principe du préleveur payeur et du pollueur payeur de nos ressources fossiles en eau soit transposé sur le Code minier et l’appliquer aux opérateurs dans le domaine minier. Il y a également l’encadrement des exploitants miniers. Il s’est agi ici, dans le cadre des différentes mesures que nous sommes en train de prendre, de mieux encadrer les exploitants miniers, notamment ceux qui sont dans l’orpaillage, dans le domaine artisanal et dans le domaine semi-mécanisé. Il y a également le renforcement des capacités du Centre de Recherche Géologique et Minière (CRGM) qui est un outil au niveau du Ministère des Mines qui permet de faire de la recherche géologique et minière. Ce centre a vu ses capacités renforcées avec la coopération avec un pays ami qui nous aide dans la mise en œuvre du laboratoire du centre. Et également nous allons entamer tout ce qui concerne la division recherche par rapport à ce centre. Il y a la prospection en vue de l’amélioration de la chaine des valeurs. Là également, c’est une démarche que nous avons entreprise avec des opérateurs étrangers pour notamment améliorer la chaine de valeur au niveau de l’exploitation de l’or, faire en sorte que l’or qui est exploité au Niger puisse être transformé au Niger et valorisé, notamment par le raffinage et la production de bijoux en or.
Monsieur le ministre, en attendant les grandes réformes du secteur minier, pouvez-vous nous dire quelles sont les mesures prises pour protéger nos ressources minières souvent illégalement et clandestinement exploitées par des informels, voir des réseaux criminels et terroristes ?
Les dispositions qui sont prises, c’est d’abord de la sensibilisation à l’endroit de nos concitoyens qui sont dans l’exploitation des Mines. Je peux vous assurer qu’il y’a des milliers, notamment dans l’exploitation de l’or. Quand vous allez dans le Nord du Niger, dans la région d’Agadez, vous allez rencontrer des milliers de Nigériens sur des espaces complètement vides et ils sont en train de faire de l’exploitation de l’or. C’est le cas de Tchibarkaten. Dans l’Ouest du pays, c’est la même chose. Ces populations ont besoin d’être sensibilisées par rapport au cadre légal et règlementaire dans l’exploitation des ressources. Donc, nous les sensibilisons à se formaliser pour sortir de l’illégalité et nous les accompagnons dans ce sens pour les démarches administratives qu’il faut faire pour pouvoir acquérir un titre minier. Nous avons aussi entrepris des mesures répressives à l’endroit de certains opérateurs qui sont dans l’illégalité et, là, c’est la juste application des dispositions légales et réglementaires du Code minier. Je peux, à ce titre, vous dire qu’il est prévu dans le Code minier, des peines de prison en cas d’exploitation illégale ; il est prévu des amendes, des dédommagements et des saisies de matériels avec lesquels les opérateurs sont en train de faire illégalement l’exploitation. Nous avons eu des cas récemment dans la région d’Agadez toujours, où certains ressortissants étrangers se sont permis de faire l’exploitation sans en avoir l’autorisation. Et donc, à ce niveau-là, nous avons saisi la justice, nous avons porté plainte avec constitution de partie civile par le Ministère des Mines. Et ces opérateurs sont composés de deux groupes dans la région qui ont été arrêtés et mis en prison en attendant leur jugement. Il y a également le déguerpissement de certains sites illégaux, notamment dans le département de Bilma. Tout dernièrement, nous avons procédé à des opérations de déguerpissement, en collaboration avec les FDS, qui ont conduit à des saisies de matériels utilisés dans ce domaine. Il y a également un site dans la zone de Makalondi qui a été déguerpi par nos FDS.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire, d’ores et déjà, quelles sont les mesures prises à ce jour pour promouvoir un cadre favorable, incitatif aux investisseurs pour la diversification de l’exploration des ressources minières ?
La révision du cadre légal et réglementaire, c’est l’une des actions qui ont été déjà faites et qui vont certainement se poursuivre parce qu’il n’y a pas de loi qui soit parfaite. Donc, nous continuons à réfléchir, à faire du benchmarking avec des pays connus dans le cadre des dispositions légales et réglementaires attractives pour les investissements miniers. Nous allons poursuivre ce travail de révision du cadre légal et réglementaire. Il y a également la promotion de l’investissement local par les opérateurs publics et privés nationaux. C’est à ce niveau que nous devons faire un gros effort pour sensibiliser notamment la jeunesse nigérienne à investir dans le secteur minier, à investir conformément à leur capacité, à leur échelle. Il ne s’agit pas simplement d’aller vers des grandes mines industrielles. On peut commencer par des petites exploitations semi-mécanisées pour grandir. Et pour cela, nous faisons appel aux Nigériens, notamment ceux de la diaspora qui ont les moyens d’investir dans ce domaine, de venir le faire dans leur pays. Egalement, nos opérateurs économiques qui ont une certaine capacité, nous les sensibilisons à venir investir dans le domaine minier car, c’est un domaine qui peut porter l’économie nationale dans notre pays.
Quels sont les exemples que vous avez par rapport à ces mesures incitatives ?
Rien que la semaine dernière par exemple, j’ai pris contact avec le président de la chambre de commerce et d’industrie du Niger pour lui dire qu’il y a une société d’exploitation minière avec laquelle nous avons échangé et qui est prête à ouvrir le capital de cette société. Et donc, nous sommes allés vers lui en demandant de voir avec les opérateurs économiques nigériens qui sont intéressés à investir dans le capital de cette société qui est d’ailleurs en construction de sa mine et cherche des investisseurs. Nous participons toujours à des forums internationaux pour faire la promotion de notre pays, défaire la campagne d’intoxication qui a été faite à notre pays, notamment pour son secteur minier. Nous gardons les bras ouverts tout en ayant nos points fermés en ce qui concerne notre souveraineté sur nos ressources naturelles pour le bien-être de nos populations.
Monsieur le ministre, le gouvernement a décidé de la création de plusieurs sociétés minières nationales, qu’est-ce qui a motivé cette décision et quel est l’état d’avancement de ce projet ?
Tout d’abord, ce qui a motivé cette décision, ce sont les constats. Le premier constat, c’est que notre pays, le Niger, est riche en ressources minières. Le deuxième constat, c’est qu’il n’y avait pas de société d’Etat exclusivement dédiée à l’exploitation minière dans notre pays, malgré la richesse minière de notre pays, ce qui est un paradoxe. La seule société qui est dédiée au secteur minier, c’est la SOPAMIN qui est sous la tutelle du Ministère des Mines, mais qui est principalement dédiée à la gestion des participations de l’Etat dans les différentes sociétés minières qui sont créées avec participation de l’Etat. Pour ainsi vous dire, même les substances aussi précieuses et aussi inoffensives comme l’or n’ont pas suscité d’intérêt pour les régimes précédents. Alors qu’aujourd’hui, l’or est à son plus haut niveau. La semaine dernière, en une journée, l’once d’or a pris une vingtaine de dollars de plus. Des multinationales étrangères qui gardaient par-devers elles des gisements de classe mondiale inexploités et qu’elles gardaient sous cocon. C’est le cas de IMOURAREN SA par exemple. C’est donc au regard de tous ces constats, et vu la nécessité de faire de notre secteur minier un levier de notre économie, de notre développement économique et social, que nous avons pris la décision de créer ces deux sociétés. Il s’agit de la société MAZAMAWA National Gold Compagny et de la société TIMMERSOY National Uranium Compagny. L’une est dédiée à l’exploitation de l’or et l’autre à l’exploitation de l’uranium dans notre pays. C’est pour faire ainsi comme le dit un dicton anglais « Do it by yourself », autrement dit faisons-le par nous-mêmes. Ces sociétés vont nous permettre de créer des emplois, de développer des infrastructures locales, de régénérer des ressources financières au profit de l’Etat et de renforcer nos capacités technologiques et logistiques. Par rapport à l’avancement dans la mise en œuvre de ces sociétés, je peux vous dire que MAZAMAWA est en pleine activité. Le Ministère des Mines leur a apporté un permis de recherche dans le Sud Maradi. Il s’agit du permis de Gabi qui était précédemment détenu par une société créée par un ressortissant d’un pays étranger voisin, et que nous avons retiré à notre arrivée et réattribué à MAZAMAWA. Elle a un autre permis de recherche dans la zone de DAN ISSA qui fait une centaine de kilomètres carrés pour lequel ils sont déjà en train de faire l’étude géophysique et nous espérons que, peut être d’ici la fin de l’année, MAZAMAWA sera pleinement établie. Pour l’instant, ils sont en train de recruter et de faire les procédures administratives pour leur mise en œuvre. Ce qu’il faut noter à ce niveau-là, c’est qu’effectivement nous sommes pressés, les nigériens attendent, comme vous l’avez dit.
Pour faire de la recherche minière, il faut au minimum deux à trois ans pour découvrir un gisement qui pourrait être exploité. Mais, pour le faire, il faut bien commencer et c’est ce que nous avons fait. Nous avons mis le pied dans le plat, comme on le dit. La souveraineté de notre pays dans le secteur minier passe également par notre capacité à disposer de cadres nigériens compétents, à même d’assurer l’exploitation de nos ressources.
Qu’en est-il de la formation dans ce secteur ? Et dans quel état se trouve l’EMIG, jadis une école qui faisait la fierté du Niger ?
L’EMIG fait encore la fierté du Niger. Ce que je peux dire par rapport à l’éducation et à la formation, elles sont essentielles afin de disposer de cadres compétents à même de conduire la destinée de notre pays, particulièrement du secteur minier. Vous savez, les plus grandes capitalisations de nos jours ne sont pas des sociétés minières. Les plus grandes capitalisations boursières et financières sont plutôt Apple, Microsoft et toutes ces entreprises sont des entreprises technologiques portées sur la connaissance et le savoir. Les pays comme le Japon, la Corée du Sud, n’ont presque pas de ressources. Pourtant, ces pays se sont développés par l’intelligence, le savoir et la connaissance. Nous avons donc cet avantage qui est en soi une bénédiction d’avoir des ressources minières et nous pouvons, par conséquent, faire de cette ressource un levier de notre développement économique et social. Au niveau du Ministère des Mines, nous avons des cadres très bien formés, compétents, dont beaucoup sont sortis de l’EMIG et d’autres des Universités. Nous avons également, par rapport à cette amélioration du niveau intellectuel de nos cadres, entrepris un plan de formation pour leur mise à niveau. Et pour cela, nous avons organisé un séminaire à l’endroit des cadres centraux, régionaux et départementaux sur le leadership, le management, la communication, l’éthique et la déontologie.
Pour revenir à l’EMIG, ce qu’il faut noter, c’est que, depuis quelques années, l’EMIG est sous la tutelle du Ministère de l’Enseignement Supérieur et, cependant, nous avons une estime particulière pour ce centre d’excellence. Nous collaborons avec l’EMIG pour améliorer ces conditions de formation des élèves. Je pourrais, par contre, vous parler d’une autre école qui est elle sous la tutelle du Ministère des Mines, il s’agit de l’Emaïr et par rapport à cette école, ce que nous sommes en train de faire, c’est un ambitieux programme d’augmentation de ses capacités. L’Emaïr aura bientôt 50 ans d’existence, mais on l’avait trouvée dans un état lamentable et donc nous sommes en train de rénover les infrastructures existantes, de construire de nouvelles infrastructures pour augmenter les capacités d’accueil, mais également réviser les curricula de l’école. D’ores et-déjà, à la rentrée passée, nous avons augmenté l’effectif des élèves entrant à l’Emaïr de 50% comparé à ce qu’on a trouvé.
Quelles sont les perspectives d’avenir pour le secteur des mines au Niger ?
Le sous-sol du Niger reste encore insuffisamment connu. Nous avons un taux de couverture géographique d’environ 20%. Un taux de couverture géologique d’environ 13% et un taux de couverture en géochimie de 6%. Comparé à certains pays voisins, notamment les pays de l’AES, nous sommes en deçà et pour cela nous devons renforcer ces taux pour pouvoir couvrir une bonne partie de notre territoire. Il y a également la production minière qui n’est pas très diversifiée. Quand on parle d’un pays riche en ressources minières, mais, principalement, on parle de deux substances qui sont extraites, c’est l’uranium et l’or. Et je vais vous dire même concernant l’uranium, ce que nous avons actuellement sur le terrain, il y a une société en exploitation, c’est la Somaïr ; il y a une mine en construction, c’est la Somida, de Dassa ; il y a une mine en reprise d’activité, c’est la Somina à Azelik et il y a une mine qui est fermée, c’est la Cominak.
Pour ce qui concerne l’or, nous avons une seule mine, c’est la Société des Mines du Liptako (SML) qui est en grande difficulté et il y a un grand potentiel d’orpaillage et aucune société de raffinage. Les perspectives sont claires. Nous devons et nous allons investir dans la recherche géologique et minière pour améliorer la connaissance de notre sous-sol. Nous avons un pays de 1.267.000 km² que nous connaissons à peine à une moyenne de 15%. Nous avons un potentiel minier énorme sur ces 15%. Qu’est-ce que vous pouvez projeter sur les 85% restants ? C’est vers ça que nous pouvons aller et pour ce faire, nous avons justement besoin de faire des recherches, de renforcer le Centre de Recherche Géologique et Minière. Nous avons également besoin d’attirer des investisseurs. D’abord des investissements nationaux, à commencer par l’État lui-même qui a pris le devant et est en train d’investir dans les mines à travers ces deux sociétés qui ont été créées. Et, enfin, nous devons encadrer l’artisanat minier. Notre ambition est qu’à l’horizon 2035, le Niger se dote d’un secteur minier intégré, productif et véritablement souverain à travers le développement du capital humain, l’innovation, la digitalisation et la modernisation du secteur. Il s’agit d’un avenir des plus prometteurs que celui du secteur des mines.
Nous sommes dans une nouvelle dynamique consacrée par l’avènement de la Confédération des États de l’AES. Avez-vous des projets ou envisagez-vous, dans le cadre de cette AES, l’exploitation ou la commercialisation en commun des ressources minières pour une meilleure efficacité, une véritable indépendance dans ce secteur ?
Nos trois pays, le Niger, le Burkina Faso et le Mali, partagent cette région très riche en ressources minières qui s’appelle le Liptako-gourma, d’où d’ailleurs la Charte du Liptako pour la Confédération de l’Alliance des États du Sahel. Il y avait déjà donc l’autorité de développement intégré de la région de Liptako, dont l’objet est de promouvoir la mise en valeur et le développement des ressources minières énergétiques et d’autres ressources pour cette région. Au sein de la Confédération de l’AES, nous devons mutualiser nos forces, approfondir les recherches dans le domaine minier pour découvrir des gisements qui pourraient être transversaux, c’est-à-dire à cheval sur plusieurs frontières et qui pourraient faire l’objet d’exploitation commune entre nos différents pays qui est en cours. Et c’est déjà dans le programme de la Confédération, notamment le volet développement. Il y a un aspect qui est dédié au développement de la coopération de manière générale.
Quelles sont les mesures prises par votre département ministériel pour la mise en place d’un cadre approprié de mesure de performance des actions de votre Ministère ?
Le Ministère des Mines a mis en place plusieurs mesures pour établir un cadre approprié de mesure de ses performances. Cette performance sera mesurée par une série d’indicateurs économiques, sociaux et environnementaux. Il s’agira notamment de la contribution du secteur au PIB du Niger. Nous suivons cet indicateur et je peux vous assurer qu’il est de plus en plus prometteur. La contribution du secteur, depuis l’avènement du CNSP, ne fait que croître par rapport aux recettes qui sont engrangées par notre Trésor National.
Peut-on avoir une idée précise par rapport à cette question ?
Écoutez, ça se compte en milliards. Ce qu’il faut noter à ce niveau, c’est qu’en début d’année dernière, nous avons suspendu l’attribution des permis miniers en attendant de faire l’audit des différents titres miniers. Quand nous avons repris, vers la fin de l’année, le Ministère a dû contribuer aux alentours d’une dizaine de milliards au Trésor public. Il y a également les revenus des travailleurs du secteur qui sont suivis et les investissements dans le domaine de la recherche et de l’exploitation minières. Ce sont également des indicateurs qui sont suivis. Combien telle entreprise a investi dans le domaine de la recherche ou dans le domaine de l’exploitation minière? Nous suivons également la création des emplois directs, nous suivons la formation et la sensibilisation des acteurs du secteur comme indicateur. Les mesures de protection de l’environnement sont un des indicateurs qui sont suivis et monitorés au quotidien. Et enfin, il y a la réhabilitation des sites miniers qui est un des indicateurs qui sont suivis au niveau du Ministère dans le cadre de la performance de son action.
Monsieur le ministre, pour finir cet entretien de façon globale, comment faire pour que la production minière profite aux Nigériens, car c’est la finalité même de votre mission ?
Plusieurs mesures sont prises pour que la production minière profite aux Nigériens et pour faire du secteur un levier de développement de notre pays. Il s’agit donc, dans le cadre légal de cette ordonnance sur le contenu local qui fera que plus de Nigériens seront employés dans le secteur et plus d’entreprises nigériennes seront impliquées dans la sous-traitance et l’offre de biens et de services au profit des entreprises du secteur. Il y a également toutes les dispositions qui ont été prises au niveau du Code minier. Il y a la création de ces entreprises nationales dont on a parlé, elles contribuent à ce que le secteur rapporte beaucoup plus aux Nigériens et il y a cette incitation des jeunes, des femmes à investir dans le secteur minier. Vous allez être surpris quand je parle de faire en sorte d’inciter les femmes à s’investir dans le secteur minier. Mais, d’ores et-déjà, nos femmes sont des opérateurs miniers. Au niveau des villages, certaines substances sont produites, récoltées par les femmes et donc revendues à certains opérateurs. Je peux vous parler du gypse dans un premier temps qui est exploité dans les villages par les femmes. Le phosphate est également exploité. Il y a toutes ces argiles qui sont exploitées et transformées. Il y a les graviers, le sable, c’est de l’exploitation minière, il y a un besoin à ce niveau. Au niveau local, c’est de faire en sorte que ces populations, notamment les femmes, s’organisent pour mieux profiter de cette exploitation des ressources minières. Également, au niveau des jeunes, comme je l’avais dit précédemment, c’est de s’investir dans le domaine minier. C’est l’un des secteurs qui peut très facilement développer notre pays et apporter des ressources à notre jeunesse. Et comme je l’ai dit, il n’a pas besoin d’être employé dans une entreprise, dans une multinationale ou une entreprise étatique. Il y a un besoin d’entreprendre soit même, d’aller à la recherche de certaines substances qui se revendent et qui se transforment souvent même au niveau national pour pouvoir produire par exemple des engrais. J’ai rencontré des jeunes nigériens souvent qui viennent de la diaspora qui sont intéressés et qui ont investi actuellement dans la production des engrais. Là également, il faut faire en sorte que ces substances fassent en sorte que nous atteignions notre souveraineté alimentaire et peut-être même, comme le dirait quelqu’un, nourrir l’Afrique et le monde. Nous pouvons le faire avec ces substances, car nous avons les terres arables, nous avons l’eau dans le sous-sol pour pouvoir développer ce secteur qui est l’agriculture.
Quel sera votre mot de la fin ?
Je voudrais dire que, depuis les évènements du 26 juillet 2023, sous l’impulsion du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, notre pays a emprunté une nouvelle voie, celle de sa liberté, une liberté véritable, une liberté qui dépasse les apparences, où chaque citoyen a aujourd’hui la fierté de voir ces richesses nationales exploitées dans le cadre de la transparence, de l’éthique et de l’intégrité.
Nous sommes un pays riche en ressources minières. Cependant, les ressources minières, aussi abondantes soient-elles, sont épuisables. Une mine dure une vingtaine, une cinquantaine d’années au maximum. Mais, ce sur quoi nous devons le plus nous porter, car les mines ne sont pas renouvelables, c’est de créer des compétences. Une fois épuisés, les gisements ne se reconstituent plus. Comme je l’avais dit tout à l’heure, il faut créer du savoir-faire, faire de l’intégrité des hommes et des femmes qui exploitent ces ressources pour que ces ressources puissent apporter un développement humain, social, et économique et que le pays puisse fonder son développement sur l’exploitation de ces ressources. L’investissement dans les ressources humaines est indispensable. Le capital humain est la richesse la plus précieuse du Niger. Nous avons une population grandissante et qui a besoin d’investissement en elle pour construire le Niger de demain. J’appelle donc chaque Nigérien de s’investir aujourd’hui pour les générations actuelles, en investissant dans le domaine minier pour faire en sorte que cet investissement puisse être porteur de développement humain et d’économie sociale au profit de nos générations futures.
Script : ONEP