Le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou a effectué, le samedi 22 octobre 2022, une visite de travail dans la région de Diffa. En compagnie d’une forte délégation comprenant des membres du gouvernement et de son cabinet ainsi des députés au titre de la dite région, le Chef du gouvernement est allé constater de lui-même les effets de la montée des eaux de la Komadougou Yobé dans cette zone. En effet, depuis plusieurs jours, la commune urbaine de Diffa et les villages environnants riverains de ce cours d’eau subissent des inondations exceptionnelles, jamais vécues à certains endroits, selon plusieurs témoignages. Et le moins qu’on puisse dire est que la situation est critique. C’est pourquoi, le Chef du gouvernement a tenuune réunion à huis clos avec les différents acteurs concernés. De même, M. Ouhoumoudou Mahamadou a annoncé une batterie de mesures urgentes décidées pour alléger les souffrances des sinistrés et celles à moyen terme qu’entend prendre le gouvernement pour faire face à cette situation.
C’est aux environs de 9h 30 mn que le C130 des Forces Armées Nigériennes (FAN) s’est posé sur le tarmac de l’aéroport Mamadou Tandja de Diffa. A sa descente de l’avion, le Premier ministre a été accueilli au pied de la passerelle par le gouverneur de la région de Diffa, M. Issa Lémine. Il a ensuite reçu les honneurs militaires que lui rendait un détachement des FAN avant de saluer les officiels présents à l’accueil. Le cortège s’est aussitôt rendu à la résidence présidentielle pour une réunion de briefing sur le programme de la visite. Commence alors une journée marathon pour le Chef du gouvernement et la délégation qui l’accompagne, une journée ponctuée de visites, d’échanges avec les techniciens, les autorités administratives et coutumières ainsi qu’avec les populations affectées par ce sinistre sur différents sites.
Le quartier Sabon Carré dans la commune urbaine de Diffa a constitué la première étape. Ce quartier est l’un des plus affecté par la furie de la Komadougou. Arrivé sur les lieux aux environs 11h30mn, le Premier ministre a reçu un accueil chaleureux des populations de cette zone. Bien qu’affectées par le sinistre, elles ont su tirer du fond de leur être, la force de montrer au Chef du gouvernement le soulagement que procure sa venue sur les lieux, à leurs côtés dans ces moments difficiles.
Une digue relativement haute protège le restant du quartier en face d’une grande voie. De l’autre côté de cette digue s’étend, à perte de vue, un champ de ruines de maisons en banco et en semi dur. On y aperçoit également la première digue érigée avec des sacs de sable mais qui n’a pas pu arrêter la montée et la progression des eaux. Sur un tableau monté sur un chevalet, un agent de la Protection civile, explique au Premier ministre, images à l’appui, l’évolution du sinistre. Après ces explications et quelques mots de réconfort et d’encouragement aux femmes et aux jeunes rassemblés, le Premier ministre a mis le cap sur le village de Kangouri à une dizaine de kilomètres sur la route de N’Guigmi.
Kangouri : la Komadougou aux portes du village, du jamais vu
Déjà à la sortie de la ville de Diffa, un bras de la Komadougou est visible à droite du goudron juste en face de la compagnie militaire. Une digue en terre est érigée qui, pour l’instant bloque les eaux. Juste à quelques centaines de mètres, le dépôt de la Sonidep qui est pour l’instant épargné.
Au niveau village de Kangouri, c’est la même situation. Toutefois, à la sortie du village, les eaux ont déjà enjambé le goudron et avance vers les maisons. Là aussi, une digue a été érigée d’urgence pour stopper la progression des eaux. Ce qui, pour l’instant, marche. D’après, les témoignages de certains habitants de Kangouri, les eaux de la Komadougou ne sont jamais arrivées jusqu’au niveau de leur village. Ce qui justifie, la crainte de certains d’entre eux, car les eaux se font de plus en plus menaçantes sur ce village. Au milieu de cette ambiance d’inquiétude, de jeunes et des adolescents s’adonnent à cœur joie, à la baignade et surtout à la pêche. En effet, les eaux ont emmené avec elles du poisson aussi.
Toutefois, au-delà de ce village, l’eau est déjà passée du côté nord du goudron. Selon, un conducteur, les usagers sont souvent obligés de faire un long détour pour éviter les eaux au niveau de la partie submergée de la chaussée. «Au début, c’était une petite distance.Mais aujourd’hui, on peut faire 5 à 15 km pour contourner les eaux. Et ça ne fait qu’avancer chaque jour», confie-t-il.
S’exprimant au niveau du village de Kangouri, le Premier ministre, s’est réjoui des dispositions prises par les autorités locales et les services techniques avec l’appui des entrepreneurs locaux pour contrer la progression des eaux vers les zones habitées. «Ici à Kangouri l’eau est bloquée par la barrière construite», a déclaré M. Ouhoumoudou Mahamadou.
Site d’accueil des populations de Lada : Un spectacle de désolation
Le site d’accueil des sinistrés de Lada a constitué la dernière étape des visites effectuées le samedi 22 octobre dernier. On y accède par une piste située à droite du goudron juste après le dépôt de la Sonidep. Pour rappel, le village de Lada a été totalement englouti par les eaux. L’évacuation a débuté, selon les témoignages recueillis sur place, dans la nuit du mercredi au jeudi 20 octobre. A la date du 22 octobre, 1036 ménages de ce village, soit 5783 personnes, sont affectés par le sinistre. 559 maisons se sont déjà effondrées.
Arrivé sur le site réservé à accueillir les sinistrés, le Premier ministre a trouvé un spectacle de désolation. Des populations ‘’parquées’’ à l’ombre des arbres à travers les champs de cultures, ou abrité dans des abris de fortune construits avec des matériaux précaires, juste pour avoir un peu d’ombre et d’intimité. Des bagages jonchent le sol un peu partout sans grand ordre. Un peu plus loin, des barges de fortune construites avec des bidons ou de tonneaux, continuent à faire des aller-retour au village de Lada pour évacuer les bagages que les sinistrés ont pu récupérer suite à cette évacuation dans l’urgence.
Fait remarqué et remarquable dans cette situation de chaos, c’est la présence des Forces de défense et de sécurité, pas seulement pour la sécurité des personnes et des biens mais aussi et surtout pour des soins. En effet, au moment même de cette visite, le Chef du gouvernement a trouvé, des médecins et agents de santé militaires, en pleine activité offrant des consultations et des soins aux femmes et aux enfants dont certains sont blessés lors de l’évacuation et d’autres traumatisés par les événements. Placé à l’ombre d’un acacia egyptiaca, ce centre de soins d’urgence, semble être très fréquenté au vu de l’affluence trouvée sur place. Le Premier ministre a félicité et encouragé les agents du service de santé des armées.
Comme sur les autres sites visités, le Chef du gouvernement a échangé avec les populations et leurs leaders. Tous ont témoigné positivement sur le rôle joué par les forces de défense et de sécurité pour sortir les populations du traquenard de la Komadougou. En effet, beaucoup d’habitants de ce village englouti ont eu leur salut grâce aux FDS qui, se sont mobilisées et ont mis leurs moyens notamment des pirogues motorisées pour évacuer un grand nombre de personnes et leurs biens. Ce que confirme un témoin. «Les militaires nous ont beaucoup aidés, ils ont beaucoup fait pour nous. Nous les remercions infiniment. Aussitôt après nous avoir évacués, les FDS nous ont offert des vivres. Ils nous ont donné 68 sacs», confie Aboubacar Malam Bini, un leader communautaire.
Le Chef du gouvernement a pour sa part assuré ces populations sinistrées que le gouvernement prendra les dispositions qu’il faut pour les mettre dans de meilleures conditions.
Réunion de synthèse à Diffa : Le Premier ministre annonce une batterie de mesures pour faire face à la situation
De retour à Diffa, le Chef du gouvernement a tenu une réunion de synthèse à la résidence présidentielle avec les responsables des différents services concernés ainsi que les représentants de la communauté humanitaire présente sur place. Au cours de cette réunion, une situation exhaustive a été faite au Chef du gouvernement qui, a donné des fermes instructions pour que la situation des sinistrés soit totalement prise en charge par les différents services avec l’accompagnement des partenaires au développement et ceux humanitaires.D’ores déjà, des débuts de solutions ont été initiés par les autorités locales et avec l’accompagnement de certaines bonnes volontés.
Ainsi des mesures d’urgence sont prises en ce qui concerne les populations déjà déplacées, cela en accord avec les humanitaires qui sont déjà sur le terrain. Ainsi la premier action a consiste, selon le Chef du gouvernement, à identifier et à aménager des sites pour accueillir les populations, à réaliser des adductions d’eau potable ainsi que les questions d’assainissement qui concernent ces sites mais également aborder la question des vivres et des non vivres. «Des vivres et des moyens sont déjà mis à leur disposition et disponibles ici à Diffa grâce à notre département solidarité au niveau de la Primature et au niveau du ministère de l’Action Humanitaire et de la Gestion des Catastrophes», a déclaré M. Ouhoumoudou Mahamadou.
Au titre toujours des urgences, le Chef du gouvernement a évoqué la question de la protection de la ville de Diffa pour laquelle, il faut faire des digues. «Pour l’instant, les travaux sont en cours pour réaliser des digues de sable avec les bonnes volontés et les entrepreneurs locaux qui apportent un appui inestimable grâce aussi l’appui que le gouvernement leur a accordé», a-t-il précisé.
Mais à côté de ces mesures d’urgence, le Premier ministre a souligné la nécessité d’envisager des mesures à moyen terme. «Il faut envisager la possibilité de réaliser des ouvrages sur la goudron de la RN1 pour permettre aux eaux de passer à ces endroits précis. Puisque c’est devenu une situation répétitive», a-t-il estimé. Dans le même ordre d’idée, la ville de Diffa a besoin d’une véritable digue. «Nous allons réaliser, dans le cadre des projets, une digue de protection. De manière générale, nous allons passer en revue le cours de la Komadougou puisqu’il y a une nouvelle évolution de ce cours d’eau. Ceci nous permettra de voir les mesures à prendre depuis Mainé Soroa jusqu’à Bosso», a annoncé le Chef du gouvernement.
Ces mesures doivent aussi concerner la production agricole. «Il faut se rendre compte que les zones situées au sud de la RN1 pourraient ne pas être propices à la production agricole pluviale. C’est pourquoi nous allons encourager la production irriguée et en contre saison. De même, puisque l’épandage de l’eau va au-delà du goudron, des aménagements hydro agricoles seront réalisés pour que les populations puissent s’adonner à l’agriculture au Nord du goudron», a précisé M. Ouhoumoudou Mahamadou.
Le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou a tenu à féliciter et remercier les populations de Diffa pour la solidarité dont elles ont fait montre vis-à-vis des sinistrés des villages voisins. Le Chef du gouvernement a également félicité la Protection civile et les FDS pour la promptitude avec laquelle elles ont secouru les populations notamment celles de Lada. Il a enfin félicité la mairie pour avoir identifié le site de relogement de toutes les personnes qui sont affectées et l’ensemble de la communauté humanitaire qui est aux côtés des autorités dans la gestion de cette crise.
La situation en chiffres
Selon la situation présentée par les services compétents, cette montée des eaux de la Komadougou Yobé a, à la date du 22 octobre, affecté 2.331 ménages, soit 14.952 personnes. D’importants dégâts matériels ont été également enregistrés avec l’effondrement de 2.138 maisons et de 247 cases, sans compter les cultures et ou les récoltes endommagées.
Pour rappel, la catastrophe a commencé depuis le 03 octobre où les quartiers Festival, Bagara, Charré et Diffa Koura ont commencé à être inondés. Le phénomène s’est accentué le 19 octobre sur les mêmes quartiers et sur le village de Lada en périphérie de Diffa.
Outre, ces dégâts matériels et l’impact psychologique sur une population déjà affectée par la crise sécuritaire, cette montée des eaux de la Komadougou fait craindre pour certains acteurs, les risques de conflits agriculteurs éleveurs. En effet, d’après certaines confidences, les agriculteurs coupés de leurs champs par les eaux ne peuvent plus y accéder alors qu’ils n’ont pas encore fini les récoltes. Profitant de cette situation, certains éleveurs ont commencé à mettre leurs troupeaux dans les champs. C’est pourquoi, cet état de fait doit faire parti des réflexions sur les mesures à y déployer.
A noter enfin que le Premier ministre était accompagné dans ce déplacement par le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, le ministre de l’Urbanisme et du Logement assurant l’intérim de celui de l’Equipement, le ministre l’Aménagement du Territoire et du Développement communautaire, la ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, le Directeur de cabinet du Premier ministre ainsi que plusieurs députés au titre de la région.
Siradji Sanda, (onep) Envoyé spécial à Diffa