En quoi consistent vos missions en tant qu’Intermédiaire en Opération de Banque (IOB) ?
Je tiens à exprimer ma gratitude pour cette opportunité qui m’est offerte d’apporter des éclaircissements à vos lecteurs sur l’intermédiation en opération de banque. La mission principale de l’Intermédiaire en Opérations de Banque consiste à faciliter les opérations de banque entre les institutions financières ou établissements bancaires et les clients. « Un IOB est une personne physique ou morale autre qu’un établissement de crédit qui, à titre habituel, comme activité principale ou accessoire, met en rapport un établissement de crédit avec la clientèle en vue de la conclusion d’opérations de banque». Vous comprenez dès lors que nous proposons, conseillons et assistons des clients dans la recherche, la négociation ou la réalisation d’opérations de banque sans être un établissement bancaire en tant que tel. Il s’agit d’activités de recherche de financement et de négociation, que ce soit dans le cadre des banques commerciales traditionnelles ou du système bancaire islamique. Ces activités visent à aider nos clients à trouver les solutions de financement qui leur conviennent le mieux, tout en permettant aux institutions financières d’atteindre leurs objectifs commerciaux. En général, les clients « Entreprises » ou « Corporates » ressentent davantage le besoin d’être accompagnés par les IOB que les particuliers, car ils sont plus axés sur des crédits d’investissement que sur des crédits de consommation.
Pouvez-vous retracer les grandes étapes de votre parcours professionnel qui ont précédé l’obtention de cet agrément ?
Mon parcours professionnel a été jalonné de plusieurs étapes significatives. Après avoir terminé mes études supérieures, j’ai eu l’opportunité de participer à un programme de stage de formation au sein du Fonds Africain de Garantie et de Coopération Économique (FAGACE), une institution financière internationale spécialisée dans la promotion des investissements publics et privés, basée à Cotonou, au Bénin. C’est là que j’ai consolidé ma décision de poursuivre une carrière dans le domaine bancaire. Pendant ce stage, j’ai été encadré par des experts financiers très rigoureux qui, sans le savoir peut-être, m’ont transmis les compétences essentielles d’un banquier modèle. Travailler aux côtés de ces professionnels venus de divers pays et partageant une même exigence de professionnalisme a été une source d’inspiration pour des jeunes aspirant à une carrière financière.
À mon retour au pays, j’ai été chaleureusement accueilli par les banques, et j’ai débuté ma carrière à la Sonibank. Rapidement, j’ai compris que cumuler différentes expériences dans le secteur financier serait un atout précieux pour gravir les échelons. Même si mon parcours suscitait parfois des interrogations, mes objectifs étaient clairs. J’ai alors décidé de changer d’institution et de rejoindre une banque de groupe, plus précisément la filiale nigérienne d’ECOBANK, où j’ai travaillé pendant une dizaine d’années. Ensuite, j’ai eu l’opportunité de vivre une expérience d’assistance technique dans le secteur de la microfinance au Niger pendant deux ans. Cette expérience m’a éclairé sur les approches du microcrédit et de l’éducation financière, des compétences qui me sont aujourd’hui très utiles. Après cette période, j’ai rejoint la Banque Islamique du Niger, où j’ai occupé des postes de responsabilité jusqu’au 31 décembre 2021.
Pendant toutes ces années dans le secteur bancaire, je n’ai jamais abandonné ma passion pour la formation et l’enseignement. En tant que professionnel, j’ai toujours trouvé le temps d’animer des sessions de formation, aussi bien au Niger, au sein d’instituts et d’universités publics et privés, que dans toute la région de l’Union Monétaire Ouest-Africaine (UMOA). J’ai été recruté en tant que formateur par Finance sans Frontières au Togo et par le Bureau d’Information sur le Crédit (BIC) en Côte d’Ivoire, ce qui m’a conduit à dispenser des formations dans plusieurs pays de l’UMOA. Enfin, j’ai également été impliqué dans des projets de développement économique en tant que consultant financier, inscrit sur la liste des consultants de la Banque Ouest-Africaine de Développement (BOAD) depuis 2014. L’ensemble de ces expériences variées a, sans aucun doute, facilité l’examen favorable de ma demande d’autorisation d’habilitation en tant qu’IOB par les équipes de la BCEAO.
Comment a été perçue votre nomination en tant que premier Nigérien inscrit sur la liste des IOB agrées par la BCEAO au niveau de vos collègues et les acteurs du marché ouest-africain ?
Ma nomination en tant que premier Nigérien inscrit sur la liste de la BCEAO sous le Numéro NIG/00001/IOB/2023 a été accueillie avec enthousiasme tant dans le milieu bancaire nigérien, que par les acteurs du marché ouest-africain. Elle a été perçue comme une reconnaissance de mon dévouement envers le secteur financier et de ma capacité à apporter une contribution positive à l’amélioration du financement de l’économie nigérienne. Mes collègues ont exprimé leur fierté et leur confiance envers mon expertise, considérant que cette réalisation ouvrait la voie à une plus grande accessibilité aux services financiers pour les Nigériens. Les acteurs du marché ouest-africain ont également manifesté un vif intérêt pour cette nomination, y voyant une opportunité de renforcer les liens financiers et économiques au sein de la région. Par exemple, nous avons reçu des félicitations de la part de certains hauts dirigeants de banques renommées de Niamey. De même, plusieurs IOB de la sous-région ont exprimé leur joie en m’accueillant chaleureusement dans le cercle des professionnels agréés, manifestant ainsi leur intérêt pour une future collaboration et un échange d’expériences. Je tiens également à exprimer ma gratitude envers toutes les autres associations du Niger auxquelles nous sommes affiliés, telles que l’Ordre des Experts et Consultants pour l’Afrique (ODECA) continental et la Confédération Internationale des Diplômés de l’ITB (CIAD-ITB). Bien que je ne puisse pas les nommer individuellement, je tiens à les remercier sincèrement par le biais de vos colonnes.
Pourquoi les taux d’intérêt et les coûts d’assurance associés aux crédits au Niger sont-ils souvent perçus comme élevés ?
Le taux d’intérêt est le prix du loyer de l’argent. C’est le prix qu’il faut payer pour emprunter de l’argent, c’est aussi le prix que l’on reçoit quand on prête de l’argent. Ceci s’exprime sous forme de taux. Sachez que pour notre zone les banques ne fixent pas ses taux par leur propre volonté. C’est le taux directeur de la BCEAO qui sert de base à la fixation des taux pour les banques.
Les taux d’intérêt élevés et les coûts d’assurance associés aux crédits au Niger peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs : Risques élevés : Le secteur financier peut être confronté à des risques élevés, ce qui peut se traduire par des taux d’intérêt plus élevés pour compenser ces risques. Coûts opérationnels : Les institutions financières doivent couvrir leurs coûts opérationnels, ce qui peut influencer les taux d’intérêt. Le manque de concurrence dans le secteur financier peut limiter les incitations à réduire les taux d’intérêt. La réglementation financière peut également avoir un impact sur les taux d’intérêt et les coûts d’assurance. En tant qu’IOB, l’une de mes missions est de travailler avec les institutions financières pour identifier des solutions de financement plus abordables pour les clients, tout en garantissant que ces solutions soient viables pour les prêteurs.
Quels sont les défis majeurs que vous envisagez de relever en tant qu’IOB pour apporter votre contribution à l’amélioration du financement de l’économie au Niger ?
En tant qu’IOB, les défis peuvent être importants pour contribuer à l’amélioration du financement de l’économie au Niger. Certains de ces défis incluent pour le secteur financier, l’éducation financière est essentielle pour aider les clients à comprendre les produits financiers et à prendre des décisions éclairées. On pourrait travailler avec les institutions à promouvoir l’éducation financière parmi les clients. En ce qui concerne l’accès au financement, nous pouvons garantir une équité d’accès au financement pour tous les segments de la clientèle représente un défi essentiel. De plus, il serait opportun de promouvoir l’expansion de l’accès au financement, en mettant particulièrement l’accent sur les secteurs stratégiques de l’économie qui éprouvent actuellement des difficultés à obtenir des financements, notamment les très petites et moyennes entreprises (TPME). Il pourrait être envisagé d’instaurer un programme structuré, impliquant des levées de ressources pour les banques en collaboration avec des bailleurs de fonds engagés dans cette démarche. Le secteur financier est soumis à des réglementations strictes. On pourra donner des conseils pour que toutes les transactions soient conformes aux lois et aux réglementations en vigueur. Le secteur financier est en constante évolution. Il faudrait être à jour avec les dernières innovations pour offrir les meilleures solutions à mes clients.
En tant qu’IOB, je peux aider l’État à mobiliser des ressources financières en facilitant la négociation de prêts et le placement d’obligations sur les marchés financiers. Le financement islamique sous forme de SUKUK aussi pourrait être envisagé. Et comme conseils en gestion de la dette on pourra guider l’État sur la structuration de sa dette, en optimisant les conditions de remboursement et en minimisant les coûts.
Quel est l’impact que votre accréditation d’IOB apportera au Niger et au secteur bancaire en général ?
Très modestement ceci pourrait contribuer à améliorer l’accessibilité au financement. En tant qu’IOB, je vais travailler activement à élargir l’accès au financement pour un éventail plus large de Nigériens, y compris les particuliers et les entreprises. Cela permettra de stimuler l’activité économique en favorisant la croissance des petites et moyennes entreprises et en facilitant l’accès à la propriété pour les citoyens. Nous pouvons contribuer à former les jeunes banquiers avec l’Investissement dans le capital humain. En effet l’investissement dans le capital humain est prioritaire pour l’ensemble de l’industrie bancaire au Niger. Il ne faut jamais penser faire des économies sur les formations du personnel. Aujourd’hui les investissements sur le capital humain ont un impact direct sur la productivité, la qualité de service, la réduction d’erreurs opérationnelles, l’adaptabilité des agents aux changements, et même la réduction du turnover.
Aussi s’agissant du renforcement de la conformité, en travaillant en étroite collaboration avec les institutions financières, on pourrait contribuer à renforcer la conformité à la réglementation financière et à promouvoir une culture de transparence et d’intégrité au sein du secteur bancaire. L’IOB apporte une perspective nouvelle et une agilité dans le secteur bancaire. On va encourager l’innovation dans la prestation de services financiers, y compris l’adoption de technologies financières, pour améliorer l’efficacité et la commodité pour les clients.
En stimulant la concurrence et en favorisant des conditions plus équitables pour les emprunteurs, on pourrait contribuer à rendre le secteur bancaire nigérien plus compétitif et à encourager les institutions financières à offrir des produits de meilleure qualité. Nous devons participer en tant qu’IOB à l’intégration régionale. En tant que professionnel agréé, on pourrait faciliter les transactions transfrontalières et en favorisant les investissements étrangers au Niger. Mon accréditation témoigne de mon engagement envers l’éthique et l’intégrité professionnelles. Cela contribuera à renforcer la confiance des clients et des investisseurs dans le secteur financier nigérien. En résumé, cette accréditation en tant qu’IOB apportera une contribution significative à l’inclusion financière, à la croissance économique et au développement du secteur bancaire au Niger, tout en favorisant la stabilité et la confiance dans le système financier. Aujourd’hui quelle que soit sa position on doit contribuer à l’effort de construction national. A l’heure actuelle la notion de patrie est une valeur irremplaçable. Pour paraphraser ce proverbe (luluwa) du Congo (Ex Zaïre) « Mon pays je l’aime, même s’il y sévit la famine ». Le Niger je l’aime pour l’honneur de la patrie !
Propos recueillis par Aïssa Abdoulaye Alfary (ONEP)